Fin décembre 1985, j’ai enfin réalisé un rêve: visiter Égypte
J’ai été émerveillée. Je me sentais exactement comme vivant dans un film. Tout était comme on le voyait à la TV. Les gens étaient joyeux, rieurs, bons vivants, accueillants, souriants…
C’était un voyage organisé à partir de la France. A part mes parents et moi, il n’y avait que des européens, et en plus j’étais la plus jeune du groupe.
Nous avions fait la croisière sur le Nil, et un séjour au Caire.
Tous les soirs, des dizaines de bateaux se retrouvaient aux mêmes endroits. Une fois les touristes couchés, les guides et le personnel des bateaux se retrouvaient. Ils discutaient, plaisantaient, riaient….
Comme j’étais la seule arabe et la plus jeune «touriste», j’ai été «adoptée» par ces jeunes gens, et je passais toutes mes soirées avec eux. C’était génial. J’en garde un excellent souvenir.
Ces groupes comprenaient des gens très divers: des musulmans, des chrétiens, des instruits (comme les guides touristiques et les guides égyptologues), des analphabètes (comme le personnel des cuisines par exemple), des citadins, des paysans, des blancs, des nubiens… Mais ce qui était génial, c’est que personne ne semblait se soucier de ces différences: ils étaient tous Égyptiens, tout simplement.
Au Caire, pareil. Dans les rues, dans les hôtels, dans les magasins… on voyait des Égyptiens divers, mais tous rieurs, souriants, aimables….
Mes amis guides m’avaient «adoptée», et au Caire, je sortais avec eux. Je suis allée dans leurs familles, chez leurs amis… Et j’ai passé avec eux le réveillon du nouvel an.
Je me rappelle que nous avions été aux pieds des Pyramides. Ce soir-là, il y avait des dizaines et des dizaines de voitures, des familles entières, qui étaient venues accueillir le nouvel an dans la joie et la bonne humeur.
Je me rappelle aussi d’une coutume qu’ils avaient: certains nouveaux mariés se faisaient prendre en photos sur les grandes artères du Caire dans leurs tenues de mariage…
Y-avait-il à l’époque des femmes voilées dans les rues du Caire?
Je ne saurais dire. Il y en avait peut-être, mais elles devaient être en si petit nombre qu’on ne les remarquait pas. Ce qui est certain, c’est que je n’avais remarqué aucune différence entre nos rues tunisiennes et les rues égyptiennes…
Je me rappelle juste une seule remarque que m’avait faite une guide: les égyptiens chrétiens et musulmans pouvaient être amis, mais ne se mariaient jamais ensemble.
J’ai toujours gardé un excellent souvenir de ce voyage en Égypte. D’ailleurs, le jour du départ, je pleurais à l’aéroport, je ne voulais plus rentrer à Paris, je voulais rester en Égypte.
Pour l’anecdote, j’ai vu Kamel Echanawi à l’aéroport ce jour-là.
Pendant de longues années, j’ai souhaité retourner en Égypte, mais en vain, à chaque fois, j’avais un empêchement.
«La conséquence de cette orientation du régime ne tarda pas à se manifester. Un programme spécial de radio, appelé «Radio Coran», entièrement consacré à des récitations du Coran et des thèmes religieux, fut largement diffusé. Il y eut certainement des auditeurs pour accueillir favorablement cette décision. Mais on ne s’arrêta pas là. Dorénavant tous les programmes de radio ou de télévision étaient interrompus cinq fois par jour pour lancer «l’appel à la prière». Quelle que fut l’émission -film policier, histoire d’amour, comédie ou informations-, son déroulement était stoppé pour céder la place à la voix du muezzin. La dévotion nouvelle du régime fut démonstrativement encouragée au plus haut niveau.
Il devint de plus en plus apparent que ceux qui profitaient du nouvel ordre des choses en Égypte faisaient de leur mieux pour noyer la critique dans un flot religieux. D’énormes sommes d’argent, venues de l’étranger, furent attribuées principalement à la fraction des Frères Musulmans qui étaient disposés à soutenir le régime. (…) De grosses sommes d’argent allèrent aux universités où de coûteuses expositions de livres religieux furent fréquemment organisées. On créa des sociétés dont l’objectif déclaré était de fournir aux étudiants ce qui fut appelé «le costume musulman»: voiles pour les filles, galabiyehs pour les garçons. Les étudiants les plus pauvres accueillirent volontiers cet uniforme qui, en abolissant toute distinction sociale, leur servait de cache-misère.
Des efforts spéciaux furent déployés afin que les étudiants soient correctement représentés dans leurs unions. Un seul exemple: aux élections qui eurent lieu à l’université d’Alexandrie, au début de l’année universitaire, à l’automne 1978, les candidats de l’Association Islamique remportèrent les soixante sièges dans les facultés de médecine et polytechnique, quarante-sept des quarante-huit sièges de la Faculté de droit, quarante-trois des soixante de la Faculté de pharmacie. Ces nouvelles unions d’étudiants ne tardèrent pas à s’imposer. Elles prônèrent avec insistance la ségrégation des sexes, tant dans les salles de cours que dans les cafeterias. Elles voulurent que, chaque jour, l’ouverture des cours fût précédée d’une prière. On fit droit à leurs demandes. Elles interdirent la célébration des fêtes nationales laïques et dénoncèrent la Journée des mères comme cérémonie athée.
Se sachant soutenus par la plus haute autorité de l’État, les étudiants islamiques commencèrent à se comporter comme s’ils dirigeaient de fait les universités. Ils tranchèrent sur ce qu’il fallait, ou ne fallait pas, enseigner, interdisant, par exemple, violences à l’appui, que des cours soient donnés sur le darwinisme. Ils mirent un terme aux célébrations qui accompagnaient traditionnellement le départ d’un professeur à la retraite ou son transfert à un autre poste, sous prétexte que ces célébrations tournaient souvent en fêtes de musique. Ils s’arrogèrent le droit de sélectionner la nourriture qui pouvait ou ne pouvait pas être servie dans les campus, distinguant ce qui était «nourriture islamique» de ce qui ne l’était pas.
Tout étudiant qui manifestait publiquement son désaccord avec les groupes islamiques était l’objet de mesures disciplinaires sévères. Les garçons et les filles qui étaient vus ensemble étaient battus. Un jour, à l’université du Caire, des centaines de membres de l’Association Islamique apparurent soudain armés de couteaux en forme de corne de gazelle….
(…)
Consciemment ou inconsciemment, le régime semblait déterminé à vérifier la formule de Marx selon laquelle «la religion est l’opium du peuple». Mais le malheur était qu’il ne savait pas à quel genre de religion il avait affaire. En effet, le nouveau courant du fondamentalisme musulman qu’il encourageait aussi imprudemment était fort superficiel, visiblement plus attaché aux manifestations rituelles et à la lettre du Coran qu’aux véritables leçons de l’histoire. Il ne s’agissait pas d’une tentative de comprendre et de recouvrer les grands idéaux des premiers temps de l’Islam, comme Ibn Hanbal et Ibn Taimiya l’avaient fait, mais d’un camouflage grossier des problèmes politiques et sociaux sous la galabieyeh et le chador. D’autres courants de fondamentalisme étaient à l’oeuvre, ailleurs. Et celles-ci n’étaient ni perçues, ni contrôlées par les autorités. Le régime et ses séides couvaient un monstre. Un jour, probablement plus tôt qu’ils ne s’y attendaient, il allait se retourner contre eux et les déchiqueter.»
Voici la deuxième partie de la traduction de l'article de "IGNORANCE, QUAND TU NOUS TIENS!" de Foued Zaouche. La traduction est toujours de Mahéva. Merci encore Mahéva.
إننا لا نعدو أن نكون مستعملين و لسنا بمبدعين. أين هو علمنا؟ أين بحوثنا الأساسية؟ أين طبّنا؟ هذا ما حقـّق في وقت ما عظمة الحضارة العربية، و هذه هي الحقيقة الوحيدة التي تـُقـَدّر. هذه الأسئلة يجب أن تطرح على الملتحين أصحاب العمائم ذوي الزهو العجيب و رباطة الجأش غير المفهومة عندما نستمع إليهم و هم يؤكدون أننا الأفضل، أننا الوحيدون الذين نمتلك الحقيقة و أن الآخرين جميعهم على خطأ، فهم كفار و مقرهم جهنم
أيها الجهل، عندما تحكم قبضتك علينا!
أواصل كلامي على الحجاب و أتساءل لماذا فرض الله الحجاب على المرأة المسلمة و لم يفرضه على المرأة المسيحية، أو اليهودية، أو الصينية أو الهندية... هل الغرض من ذلك حمايتها من الرجل العربي، الأخرق و الفظ بشكل خاص؟ لقد كتبت في السابق مقالا عنونته "لا يجب أن نحجب المرأة بل يجب أن نحجب شهوة الرجل"، لأنه يبدو لي جليا أن المشكلة ليست في المرأة بل في الرجل في حد ذاته، الرجل الذي لا يعرف كيف يتحكـّم في غرائزه و الذي يعتبر رؤية المرأة سببا للاختلال العلني
لقد كتبت مقالا آخر في نفس الموضوع عنونته بـ"من أجل مرتبة لقاصر مرغوب فيها و مطالب بها" بشأن أولئك النساء اللاتي تقبلن عن طواعية بخسارة حقوقهن القانونية و الاجتماعية بارتداء الحجاب الذي تحث عليه الشريعة، النظام القانوني الذي يشيد به كل الإسلاميين حتى المعتدلين منهم، كما لو أن هناك إسلاميين معتدلين. لأن هذا هو صلب الموضوع: بارتدائها الحجاب توافق المرأة على مكانتها كقاصر. هكذا ستعرف المرأة التونسية تراجعا لا مثيل له، و هي التي تحظى بمساواة تقارب على الاكتمال مع الرجل إذا استثنينا مسألة الإرث، التي آمل أن تجد حلا لها في يوم ما. هل تعلم هذه الجامعيات اللاتي اخترن الحجاب بهذا؟ إن المرأة الجزائرية أو المغربية أو المصرية و لست أتكلم عن الأخريات المسكينات... هؤلاء ليس لديهن ما يخسرنه لأن مكانتهن القانونية في الحد الأدنى و لكن بالنسبة للتونسية فالأمر يختلف، لأنها في خمسين سنة من الاستقلال تحصلت على مكانة فريدة تحسدها عليها النساء الأخريات في العالم العربي. هل تعتقد هؤلاء الشابات التونسيات اللاتي ترتدين الحجاب أن بإمكانهن التمتع بكامل حقوقهن القانونية الحالية لو أن أولئك الذين يدفعونهن إلى هذا السلوك يحكمون يوما هذه الدولة؟ هؤلاء سيعودون بنا إلى أزمنة التطير و الفوضى، إلى العصور الوسطى الظلامية التي سيكونون الوحيدين الذين سيحققون منها أي كسب يذكر. سيعم الاختلال و الإفلاس الاقتصادي، خاصة و نحن لا نمتلك أي فراش من البترودولار الذي قد يخفف علينا من حدة الصدام. نحن نتغذى فقط من عرق جبيننا، من انفتاحنا و من تسامحنا مع الآخر
إن كل ديانة تحمل رؤيتها للعالم و للوجود، و أعظم تجديد في الإسلام، فريد في تاريخ الديانات، هو تحريره للمؤمن من سلطنة رجال الدين و تركه لكل كائن أمام ضميره و جعله الحكم الوحيد للّه الرحمان الرحيم. كل منا يواجه ضميره، لكل منا عقله، ذكاؤه، إيمانه و كل منا لا يحاسب إلا على أعماله. إنها لثورة حقيقية يتوقـّف تحديثها على كل منا و علينا أن نكون جديرين بها كل يوم بالحقيقة الملموسة من أفعالنا. إن من المسيحيين من في زمانهم قد استلهموا من الإسلام، فالبروتستنتية اللوثرية تستعيد هذه العلاقة الفريدة بين المؤمن و ربه خارج حدود أي تأثير آخر. رحماكم، فلنتعلم كيف نحافظ على الدين كمجال للجمال و الإلهام و لا نخلط بينه و بين شؤون الناس و نزوعهم إلى السلطة
عن مجلة حقائق (réalités) العدد 1110 بتاريخ 5 إلى 11/4/2007.
Suite à la publication de ma note "IGNORANCE, QUAND TU NOUS TIENS!", plusieurs personnes non francophones m'ont demandé une traduction. Comme je suis totalement incapable de le faire, j'ai demandé à Mahéva, qui a eu la grande gentillesse de le faire à ma place.
La traduction a été faite en deux parties. Voici la première.
Merci Mahéva.
عندما يحكم الجهل قبضته علينا (1
بإمكان الجميع أن يلاحظ عودة ظاهرة الحجاب التي أخذت في الانتشار في الشوارع، في الأسواق، و خاصة وهو الأمر الأكثر خطورة، في الجامعات التي كـنـّا نرغب أن تكون معابد للعلم والمعرفة. إنـّها نتيجة الأصوليّة الزاحفة و المتستـّرة التي تشقّ طريقها في حضن مجتمعنا و التي بإمكانها هدم خمسين سنة من النضال لتحرير المرأة التونسية و تونس بشكل عام. إن الحجاب يمثـّل صفة مميـّزة لإيديولوجية سياسية معروفة، نراها بصدد العمل في بلدان أخرى و هي التي تتضمّن بذور الانقسام و الانشقاق في وطننا و التي بإمكانها القضاء على جميع جهودنا لبناء دولة حديثة. لماذا لم نتمكّن من التصدي إلى هذه الظاهرة التي يسعى البعض إلى التقليل من حدتها مع أنها علامة مريعة دالة على عمليّة نفوذ على الأذهان، نفوذ مضرّ و في غاية الخطورة على وحدة دولتنا، فمن بإمكانه أن يتصوّر أنّ أولئك الذين أوحوا بهذه المواقف سيتوقـّفون في عز الطريق؟ لقد تجرّأت على طرح بعض الأسئلة في مسألة الحجاب على اللواتي ترتدينه، و قد أدهشتني الإجابات التي تحصلت عليها ببراءتها و سذاجتها لأنه من غير المسموح لي أن أشك في صدق المواقف. قالت لي إحداهن أن بصفتها مؤمنة، فإن الحجاب فريضة، و أكدت أخرى أنّها بالحجاب ستكسب مكانا في الجنة، و قالت أخرى أنها تعبر عن تضامنها مع المرأة الفلسطينية و العراقية و أن الحجاب جزء من هويّتها العربية الإسلامية... ما هي الإجابة الممكنة على هذا؟ بأنهم يكذبون عليكم، بأنهم يتحكمون بكم، بأنهم يستعملونكم لغرض إيديولوجية ليس لها من هاجس سوى أن تقع عمليات الإشهار لصالحها و التي لم توجد في بلدنا إلا منذ ثلاثين سنة. هل تعتقد هؤلاء النسوة المتحجبات أنهن أكثر إيمانا و أكثر جدارة بالتقدير من اللواتي لا ترتدين الحجاب؟ أي ادعاء هذا؟ مع العلم أن الإسلام يشهّر بهذه المواقف التفاخرية. لقد كتبت العديد من المقالات في هذا الموضوع، و قد حاولت في كل مرة أن أتناول هذا المحور مع يقيني العميق بأن الله في القلوب و ليس في المظاهر و أن ارتداء الحجاب ليس إلا خطة سياسية لإخضاع الضمائر. إن الدليل على ذلك هو أن هذا الحجاب الذي يتم عرضه لا يتجاوز تاريخه الثلاثين سنة مع تصاعد الإسلام السياسي. يبتدئ الأمر بالتأسيس لارتداء الحجاب و الذي قد يبدو أمرا تافها، إلا أنه يتم إجبار الضمائر على أن يستمدوا الصفات المدنية المميزة مما هو ديني. طريقة اللباس ثم السلوك... و من المرجع؟ من الذي يمتلك المعرفة؟ إنهم المتدينون الذين يصبحون أسياد ما يمكن فعله و ما لا يمكن فعله، ما يمكن قوله و ما لا يجب قوله. إنهم يتقلدون لباس القديسين المعصومين من الخطأ و يصبحون المرجع في كل شيء. و هكذا يصبح الباب مفتوحا أمام كل المراوغات. إن الإسلام دين الفطنة و التفوق على الذات، إنّ الإسلام يحثـّنا على أن نتحسّن و نتفوّق و لا يحب المنع: "لا إكراه في الدين". هل يمكن لمن درس التاريخ أن يعتقد عن صدق بأنه بعد أربعة عشر قرنا من الإسلام يتميز الرجل العربي اليوم بأفضلية من نوع خاص؟ إنه لا يختلف عن الشعوب الأخرى التي مرت، كل بدورها، بلحظات المجد. لقد عرفت الحضارة الإسلامية أوجها كما هو الشأن بالنسبة للحضارات الأخرى. لا يجب تعهّد الوهم الطفولي الذي يقول بأن الحضارة العربية الإسلامية كانت متفوقة على الحضارة المصرية أو حضارة ما بين النهرين أو الحضارة الصينية أو الهندية أو اليونانية أو الرومانية الخ... إنه من غير المنطقي أن ننغلق في ماض مهما كان مجيدا و أن يصبح هذا الماضي هو المرجع الوحيد مع نسيان الحاضر و مع نسيان أنّ العالم العربي الإسلامي غائب في الوقت الحاضر عن الإبداع العلمي و أنه لا يعدو أن يكون حائزا على نسبة ضئيلة من الإجازات العلمية التي تساهم في تطوّر الإنسانية.
عن مجلة حقائق (réalités) العدد 1110 بتاريخ 5 إلى 11/4/2007.
En faisant du rangement ce matin (ce n'est pas une habitude, c'est juste une coincidence!), je suis tombée sur cet article. Il va sans dire que je suis à 100% d'accord avec l'auteur. J'aurais aimé avoir écrit cet article moi-même.
Comme je l'ai dis, j'ai publié des commentaires faisant suite à ma note "Bigamie en Tunisie?" avec lesquels je ne suis pas, mais vraiment pas d'accord, mais liberté d'expression oblige...
Alors, ce matin, en trouvant cet article, je me suis dite: "voici ma réponse".
Voici d'ailleurs, une conception de Dieu qui me convient. C'est celle que l'on m'a enseignée avant que certains viennent jeter de l'ombre dans les esprits.
(SVP, cliquez pour agrandir)
"Si ton Seigneur l'avait voulu, tous ceux qui sont sur terre auraient cru..., Est-ce à toi de contraindre les gens à devenir croyants?"(Coran)
C’est une coïncidence mais hier soir j’ai dîné avec une amie tunisienne musulmane, mariée à un égyptien chrétien.
Et bien sûr, comme j’avais encore en tête ma note d’hier, la discussion a un peu porté sur les enfants qui naissent de telles unions.
Après avoir lu la note de Nadouille, et les commentaires qui ont suivi, j’ai de nouveau appelé mon amie ce matin pour avoir un peu plus d’éclaircissements.
Le mari de mon amie (qui est un homme formidable) est un égyptien chrétien. Il a refusé de se convertir à l’islam. C’est son choix et son droit.
Lorsqu’ils ont voulu se marier, leur mariage était impossible aussi bien en Tunisie qu’en Égypte. Ils se sont donc mariés en France.
Ils ont par la suite fait enregistrer leur mariage au Consulat tunisien.
Au consulat, on leur a demandé un certificat de célibat. En Égypte, un tel papier n’existe pas. Mes amis ont donc fourni une attestation de la paroisse dont fait partie la famille du marié attestant qu’il est bien célibataire. Le Consulat tunisien savait donc parfaitement que le marié est chrétien (il parait que l’entête de l’attestation porte une énorme croix). Le mariage a quand même été enregistré. C’était il y a environ 12 ans.
21 jours plus tard, le mariage était mentionné sur l’extrait de naissance de mon amie. Elle a refait tous ses papiers: CIN, passeport… Elle est légalement mariée à X, chrétien.
Ce couple a eu 2 enfants, nés en Tunisie.
Depuis la loi de 1993, si le père est d’accord, la femme tunisienne peut transmettre sa nationalité. Les deux enfants de mon amie sont tunisiens depuis leur naissance. Ils ont été déclarés à la municipalité tunisienne. Ils ont tous leurs papiers, passeports, extraits de naissance… Ils vivent en Tunisie. Ils ont une scolarité normale… Par rapport à la Tunisie, ce couple et ces enfants n’ont aucun problème légal. Tout est en règle.
Par rapport à la société, voici comment les choses se présentent:
La famille de mon amie est très très tolérante. Il n’y a eu donc aucun problème d’adaptation, ni pour le mari, ni pour les enfants.
Par rapport aux gens extérieurs, cet homme présente un grand avantage par rapport à un européen: il est arabe et porte un prénom arabe. Et pour la grosse majorité des tunisiens, arabe rime avec islam. Les gens le prennent automatiquement pour un musulman.
Le seul problème qui se pose, c’est apparemment avec les enfants. Ils ne comprennent pas encore très bien cette situation. Ils ne voient pas la différence qu’il y a entre Papa et les autres (et ils ont raison, parce que les différences sont seulement dans les têtes des gens). Et lorsque à l’école, on leur raconte que seuls les musulmans iront au Paradis, ils s’inquiètent pour leur père, et ils viennent demander à leur maman si c’est vrai que leur papa ira en enfer!
J’ai une autre amie qui est mariée à un libanais chrétien, qui a aussi refusé de se convertir. Mariage impossible donc aussi bien en Tunisie qu’au Liban. Ils se sont alors mariés à Chypre. Pareil, le mariage a été enregistré au Consulat tunisien. Pareil, tout est en ordre légalement. Pareil pour les enfants, qui sont tunisiens dès leur naissance avec des papiers en règle. Cette famille habite au Liban. Je ne sais pas comment cela se passe pour eux là-bas.
Je reviens à notre petite famille tuniso-égyptienne. Leurs problèmes se trouvent entièrement du coté Égyptien.
Le mariage musulmane/chrétien est totalement interdit en Egypte. Et leur société est complètement intolérante. Notre ami était installé en Tunisie lorsqu’il a connu mon amie. A un moment, il a voulu retourner chez lui. Ils sont donc partis s’installer en Égypte, mais au bout de quelques mois, ils ont été contraints de rentrer en Tunisie. L’épouse musulmane n’a pas du tout été acceptée, ni par la famille ni par la société. Ils ont même été menacés.
Même lorsqu’ils vont là-bas en vacances, lui va dans sa famille avec ses enfants, alors qu’elle est contrainte de s’installer chez une amie à elle. Elle ne va pas dans sa famille à lui.
Légalement, comme je vous l’ai dit, leur mariage n’est pas reconnu en Égypte. Mais la grosse, l’énorme surprise concerne les enfants. Le malheureux papa a voulu faire des papiers égyptiens à ses enfants. Il veut leur faire délivrer un passeport égyptien… Il dépose donc une demande au consulat égyptien en Tunisie. Quelle est donc la réponse qu’il reçoit?
ما بني على باطل فهو باطل
Je traduis: ce qui est construit sur un fondement nul, est nul.
Ou pour être plus claire, ces enfants n’ont pas d’existence légale en Égypte
La seule manière, d’après l’avocat égyptien de faire reconnaître ces enfants en Égypte, serait que l’épouse porte plainte en Égypte contre son mari pour reconnaissance en paternité. Absurde. Absurde de chez absurde.
C’est-à-dire que ces enfants légitimes, issus d’un mariage légal à l’étranger, mais non reconnu en Égypte, ne peuvent être égyptiens légalement et légitimement. Par contre, ils pourraient le devenir si on les considère illégitimes.
J’explique encore, parce que c’est vraiment compliqué.
En Égypte, un chrétien ne peut épouser une musulmane, leur mariage serait donc nul, et ne peut produire d’effets, donc ne peut donner lieu à des enfants légitimes.
Mais, en Égypte, un homme chrétien pourrait obliger une femme musulmane à avoir des rapports sexuels avec lui (je ne sais pas ce que veut dire obliger, pour moi, il n’y a que le viol où un homme peut obliger une femme à coucher avec lui). Bref, dans ce cas, la femme peut intenter un procès en reconnaissance de paternité contre cet homme, et l’obliger donc à reconnaître ses enfants. Dans ce cas, la filiation peut être établie légalement.
N’importe quoi, je suis d’accord!!!!
Notre ami égyptien est donc scandalisé, outré. Il ne pensait pas que ses enfants n’auraient pas d’existence légale dans son propre pays.
Mon amie a bien sûr refusé cette solution.
Résultat: ces enfants sont tunisiens, mais n’existent pas par rapport à l’Égypte.
Mes amis ont porté plainte contre l’Égypte pour atteinte aux droits de l’homme. Mais ils peuvent encore attendre longtemps!!!!
Je ne sais pas si j’ai été assez claire. Mon amie a promis de se connecter et d’essayer de répondre à vos questions. Mais elle est plutôt nulle coté informatique, donc soyez patients avec elle. J’espère qu’elle ne nous fera pas faux bond.
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