Vendredi soir, je suis allée au Théâtre Municipal. Comme je vous l'avais dit précédemment, il était prévu que nous verrions la pièces "Plus si affinités", pièce programmée depuis de longs mois. Mais voilà, une semaine avant, ON s'est aperçu que cette pièce comprenait une scène osée. ON a demandé aux organisateurs de demander à Pascal Légitimus de supprimer cette scène. Ce dernier a refusé: soit la pièce était jouée dans son intégralité, soit elle ne serait pas jouée du tout. Les organisateurs se sont mis en quête d'un nouveau spectacle de remplacement. Et c'est ainsi que la pièce censée nous faire rire a été remplacée par un spectacle de saxophonistes: Saxmachine. C'est pas pareil, mais...
La plupart des gens ont préféré se faire rembourser. Le théâtre était pratiquement vide. Les organisateurs, à mon avis, ne sont même pas entré dans leurs frais...
Mais le comble, le comble est que même ce spectacle de saxophonistes a été censuré. Oui, vous avez bien compris: CENSURE.
En effet, avant d'aller au théâtre, j'avais vu la bande annonce du spectacle, et j'ai ainsi pu constater qu'un numéro que j'avais vu dans la bande annonce avait disparu. Et ensuite, j'ai appris qu'un deuxième numéro avait aussi disparu.
Dans ce spectacle, on nous montre plusieurs musiques du monde, des musiques de films... Et à un moment, ce sont des musiques de "religions". A Tunis, nous avons donc vu le numéro qui concerne la musique "chrétienne", mais les musiques des juifs et des musulmans ont été censurées.
Dans le spectacle, nous aurions du voir les artistes imitant les juifs d'Europe centrale, avec leurs papillotes et leur chapeau dansant sur leur musique: CENSURE
Nous aurions du aussi voir des musulmans, avec voile, jouant de la musique "musulmane": CENSURE.
Pourquoi cette censure?
En Tunisie, avons-nous une telle haine des juifs que nous ne pouvons écouter leur musique?
En Tunisie, sommes-nous ce point dépourvus d'humour que nous n'aurions pu voir des musiciens nous imitant? Sommes-nous à ce point susceptibles que nous n'aurions pas pu rire de nous-même?
Je viens de terminer la lecture du livre "Au pays de Dieu" de Douglas Kennedy. Ce livre est le récit du voyage qu'a effectué l'auteur dans le sud des USA, pour suivre la voie de Dieu. EN fait, il a fait un travail de "recherche" sur les évangélistes et prédicateurs américains, très prolifiques dans le sud des USA.
Ce que je retiens de ce livre, est qu'à l'exception de certains prédicateurs sincères, qui vraiment veulent promouvoir Dieu et Jésus, les autres n'ont pour Dieu que le Dieu DOLLAR.
Sectes, églises, émissions Tv, parcs d'attractions, disques, livres, merchandising... tout est fait pour tirer un maximum de bénéfices du "produit" Jesus. Et cela se compte en centaines de millions de dollars.
Il est aussi étonnant d'entendre parler les gens touchés par la "grâce du seigneur". Ces gens dont la vie a changé lorsqu'ils ont découvert Dieu, ou lorsque Jésus leur a parlé. On constate que souvent ces gens-là étaient en plein désarroi, sans espoir, en fin de vie, empêtrés dans les problèmes... Ils essayent de croire... parfois il ne leur reste que leurs croyances pour les accrocher à la vie.
Ce livre nous fait découvrir un aspect des USA dont on entend parfois parler mais dont on ne mesure pas l'ampleur.
Personnellement, je n'ai pu m'empêcher de faire un parallèle avec ce qui se passe actuellement dans nos pays musulmans. Des prédicateurs essayent de récupérer le désarroi et la crise identitaire d'une grande partie de la population musulmane pour les manipuler, comme le font d'ailleurs ces prédicateurs américains.
Je me rappelle que l'année dernière le revenu de Amrou Khaled avait été divulgué, et d'après mes souvenirs, le montant en était énorme.
Que Dieu, le vrai, nous préserve des prédicateurs, quels qu'ils soient!
Comme il a raison.Il exprime mon opinion. Parfois j'ai l'impression que les femmes tunisiennes ont tellement pris l'habitude de leurs droits qu'ils leurs semblent immuables. Pourtant comme il est facile de les perdre!
C’était avant-hier, c’était leur anniversaire. L’occasion pour fêter nos femmes. Encore une fois. Et encore une fois, le sujet revient sur la table. Comme chaque année. Et comme chaque année, on applaudit leur émancipation. Ce n’est même pas un zeste d’autosatisfaction que l’on observe dans ces applaudissements, c’est un excès. Assurément, nos femmes sont heureuses. Grâce au Code du Statut Personnel et aux acquis sans cesse renforcés sous l’ère de Ben Ali, elles ne cessent de s’applaudir, de s’enorgueillir, de se réjouir de ces acquis. D’en être fières. Comparées aux "demi-citoyennes" de plusieurs autres pays arabes, nos femmes sont incontestablement les plus émancipées. Mais faut-il voir au dessous (sans jeu de mots) pour se positionner ? Comparées à leurs mères et à leurs grand-mères, nos femmes sont incontestablement plus avancées. Mais faut-il voir derrière (encore sans jeu de mots) pour se positionner ?
De leur liberté, de leur égalité, de leur émancipation, nos femmes semblent bien satisfaites. Et pourtant… Force est de constater qu’en matière d’égalité et d’émancipation, beaucoup reste à faire. A l’individuel et au collectif. A l’individuel. Quand on voit le nombre de femmes voilées, sans cesse croissant, ou encore le nombre de celles qui usent et abusent de tenues vestimentaires provocantes pour arriver à leurs fins, il y a de quoi s’interroger sur la mentalité de ces Tunisiennes qui continuent encore, en 2009, à croire que leurs mèches de cheveux vont titiller la libido et les pulsions de l’autre moitié de leurs concitoyens. Cette mentalité de se faire expliquer le texte religieux par des barbus enturbannés et rétrogrades, alors que le prophète, lui-même, était ouvert et émancipé. Cette mentalité de mettre en avant un décolleté ou une paire de jambes pour décrocher un quelconque service. Celles-là, de l’égalité, elles n’en veulent point entendre parler. C’est à l’homme de régler l’addition au café ou au restaurant, de subvenir aux besoins du foyer et d’être l’argentier de leurs envies. Pour elles, la femme est inférieure à l’homme et le demeurera.
Au niveau collectif, beaucoup a été réalisé en termes d’égalité, mais beaucoup reste à faire dans notre société. En dépit de leurs diplômes, le plafond de verre demeure dans plusieurs entreprises et les postes de haut niveau restent réservés aux hommes. Exemple parmi d’autres : une seule de nos banques compte une femme à sa tête. Au niveau politique, il a fallu une décision présidentielle pour appliquer une sorte de discrimination positive et pour qu’il y ait un quota minimal de femmes parmi les élus du peuple. Au niveau syndical, c’est la honte quand on sait que le bureau exécutif de l’unique syndicat en Tunisie ne compte aucune femme. Mais là où le bât blesse, et où l’égalité doit être instaurée au plus tôt, c’est assurément la question de l’héritage. En 2009, dans cette Tunisie qu’on dit émancipée, la femme n’a toujours pas droit au même héritage que l’homme. Parce que certains exégètes veulent nous faire croire qu’un texte religieux le stipule. Et à cause de ce texte, qui mérite une interprétation plus ouverte (pourtant, l'Ijtihad est bien recommandé en Islam) et conforme à l’époque dans laquelle nous vivons, voilà bafoué l’un des droits les plus justes des Tunisiennes. De nos jours, et au moins sur le papier, on peut voir un idiot inculte hériter le double de sa sœur intelligente et … émancipée. Le sujet a été évoqué à moult reprises et, dernièrement, Kalthoum Bornaz lui a consacré un film. Elle fera l’objet de violentes critiques de la part de certains journaleux qui lui lancent le texte religieux sur la figure. Une éminente professeure, sur le même sujet, a même été condamnée à mort par des apprentis-muftis anonymes.
A suivre leur logique, les femmes devront rester à la maison et s’occuper des enfants. Cela fera reculer le chômage, disent-il… A suivre leur logique, les femmes ne peuvent être ni juges, ni avocates et encore moins imam(e)s. Et pour qu’elles puissent être témoins, elles doivent se présenter en binôme. A suivre leur logique, les femmes peuvent être répudiées et flagellées et subir la polygamie de leur époux. Et tant qu’on y est, pourquoi ne pas couper la main aux voleurs, fouetter les mécréants et pendre les apostats ?
L’émancipation (relative) de nos femmes ne doit en aucun cas leur faire oublier le danger de régression qui les guette. Elles représentent la moitié de la force active de notre pays et, à ce titre, elles méritent un traitement identique de l’autre moitié des citoyens de ce pays. Leur intelligence, leur force, leur valeur ajoutée ne peuvent être remises en cause pour quelque raison que ce soit, aussi sacrée soit-elle. La Tunisie n’a pas de ressources naturelles et encore moins de rente pétrolière. Sa principale force, elle la tire de ses enfants. Tous ses enfants, sans exception de genre. Les acquis actuels ne sont pas mis en doute. Heureusement ! Mais ces acquis doivent être consolidés davantage. Ce n’est pas l’impression qui se dégage aujourd’hui. Celui qui n’avance pas recule. Pour pouvoir avancer, certains de nos hommes et plusieurs de nos femmes doivent cesser de se comparer à des pays vivant encore au Moyen-âge, exiger, jusqu’à l’obtenir, un traitement égal de la part de la République à tous ses citoyens. Et pour obtenir ce traitement, il ne faut pas baisser les bras et crier "autosatisfaction".
"... l'Histoire est toujours écrite par les gagnants. Lorsque deux cultures s'affrontent, c'est toujours celle des perdants qui disparaît. Et les vainqueurs rédigent les livres d'histoire - à la gloire de leur propre cause, en dénigrant celle des vaincus. Comme l'a dit Napoléon: "Qu'est-ce que l'Histoire, sinon une fable sur laquelle tout le monde est d'accord?" C'est la nature même de l'Histoire que d'être un compte rendu partial des choses."
Dan Brown - Da Vinci Code
Je ne sais pourquoi, ce passage du livre m'a rappelé un autre livre: "1984" de Georges Orwell, dans lequel le métier du personnage principal est "de falsifier les archives historiques afin qu'elles correspondent à l'idéal d'omniscience de Big Brother". En fait, il adapte l'histoire, en la modifiant, en cachant, au besoin en inventant... pour qu'elle "colle" à la version officielle du jour.
Et c'est un peu ce que je retiens du livre "Da Vinci Code", où on voit que l'histoire officielle du christianisme a évolué, a été changée, adaptée, modifiée... pour "coller" à la version officielle de l'Eglise. Ainsi, des siècles plus tard, des générations entières, des millions de personnes vont croire dur comme fer que tels évènements se sont produits de telle manière et non d'une autre, que telle personne a existé, telle autre n'a pas existé...
Nous sommes tous sûr que Jésus ne s'est jamais marié, qu'il n'a pas de descendants, que Marie Madeleine était une prostituée, que Noël fête l'anniversaire de Jésus, que Moïse a existé, qu'il a fait traverser la mer rouge à son peuple...
C'est sur, on nous l'a dit et redit depuis toujours.
Pourtant, et si ce n'était pas vrai?
Si ce n'était pas vrai?
Ce n'est pas vrai!
Et on peut se poser des questions, encore et encore... En fait de quoi peut-on être surs?
De pas grand chose en fait!
Da Vinci Code est sortit depuis 3 ans. Il a eu le succès que vous connaissez, pourtant je ne l'ai lu qu'il y a une dizaine de jours. Je ne sais pourquoi, je n'avait pas été attirée par ce livre, bien que dans mon entourage, tous ceux qui l'ont lu l'ont adoré. Je l'avais à la maison, mais il ne m'attirait pas.
Il y a environ 15 jours, je m'y suis mise. Je me suis retrouvée "bizarre". Le monde entier semblait avoir lu ce livre sauf moi. Et des éloges... des éloges. Alors pour ne pas mourir idiote, du moins pas trop..., j'ai fais comme tout le monde et je l'ai lu.
Ai-je aimé ce livre?
Oui et non. Je n'ai vraiment pas trouvé qu'il s'agit du livre du siècle, ni même de la décade. C'est un livre qui se lit facilement, le style est clair, l'intrigue tient en haleine...
Personnellement, le seul vrai mérite de ce livre est de montrer que nos certitudes ne sont pas vraiment "certaines", que ce que nous prenons pour sur et immuable ne l'est pas vraiment, que la vérité est relative...
Et ce qu'il dit à propos de l'histoire est tout à fait vrai de nos jours à propos de l'information, ou désinformation, ou propagande... Pouvons-nous être certains que nous ne sommes pas manipulés?
Manipulés par les médias, manipulés par les gouvernants, manipulés par les religieux....
MANIPULES
MANIPULES
P.S.: Je conseille vivement à toute personne n'ayant pas lu 1984 de s'y mettre. A défaut, lire au moins la petite étude publiée dur Wikipédia, et dont j'ai mis le lien plus haut.
Voici un message reçu sur FaceBook. Ce n'est pas la première fois, j'ai reçu pire que cela... Cliquez pour agrandir.
Traduction: Si Dieu veux, très prochainement Si Dieu veux, très prochainement Il se vengera de toi, il te brulera pour que tu sois obligée de te voiler, bien malgré toi, pour cacher ton physique des yeux des gens.
Mercredi soir, je suis allée avec mon amie Douda voir le film Thalathoun. Je l'avoue, j'appréhendais un peu, car bien que la majorité de ceux qui l'avaient vu en disaient du bien, ceux qui n'ont pas aimé avaient été virulents dans leur critiques.
Sur place, j'ai rencontré Emma, Azwaw et Stupeur. Il faut dire que la projection de ce soir-là avait quelque chose de particulier, elle se déroulait dans le cadre du ciné-club du CinéafricArt, et un débat avec Fadhel Jaziri était prévu après la projection.
Dès les premières images du film, j'ai été attirée. Très attirée même. D'abord par l'esthétique du film. Les images et les couleurs étaient très belles. Avec une dominance du bleu et du rouge.
Certains ont par la suite reproché cet esthétisme au film en disant qu'il donnait une image fausse de la société tunisienne de l'époque. Ils ont dit que cette beauté esthétique montrait des tunisiens tous beaux, bien habillés, très propres, impeccablement vêtus..., alors que la réalité était tout autre. Un spectateur avait même précisé qu'il trouvait que les images récemment filmées du film dénotaient avec les images d'archives qui étaient inclus dans le film.
Personnellement, cela ne m'a pas dérangé. Au contraire, j'ai beaucoup apprécié cet aspect du film.
Fadhel Jaziri a répondu à ce "reproche" en disant que le film n'était ni un film historique, ni un documentaire. Il n'avait pas à coller à la réalité de la société tunisienne de l'époque. Je suis d'accord avec lui. Le réalisateur nous a montré sa propre vision de cette période de l'histoire tunisienne, et une vision personnelle ne peut qu'être imaginaire et subjective.
En fait, si on fait abstraction de cette dimension historique, on peut voir le film comme une œuvre d'Art, un tableau, que l'on aime ou n'aime pas. Personnellement j'aime.
Le réalisateur a d'ailleurs insisté sur cet aspect subjectif. Il nous a appris que dans le même contexte, certains textes de Abou Kacem Chabbi avaient été "re-écris" pour "coller" un peu mieux au film.
Bref, sur cet aspect, bien que pas réel, je dirais "waow, malla wahra avaient nos aïeuls!", et je préfère les imaginer ainsi plutôt qu'en guenilles. Peut-être bien que leurs djellabas n'étaient en réalité pas aussi belles, ni aussi propres, ni aussi nettes..., mais pourquoi, pour les besoins d'un film/tableau, ne pas les représenter ainsi?
Peut-être aussi que le réalisateur voulait de part cette beauté esthétique montrer un changement: l'éveil qui se produisait en Tunisie cette époque là, un éveil à plusieurs facettes: éveil politique, éveil poétique, éveil littéraire...
Peut-être aussi qu'il voulait de cette manière nous montrer que sur une base ancienne, commençait à se greffer un discours moderne, inhabituel pour l'époque. La diction même des acteurs est moderne. Anachronisme? Non, je ne le pense pas.
Toujours est-il que les images de ce film sont en totale rupture d'avec les images habituelles du cinéma tunisien. Images sublimes je trouve.
Autre reproche qui a été fait à ce film: la quasi absence de présence féminine. Oui, c'est vrai, il n'y a dans ce film presque pas de femmes. Mais à l'époque, quel rôle jouaient-elles donc? N'étaient-elles pas souvent prisonnières des maisons et des traditions? Faisaient-elles partie de la vie culturelle ou intellectuelle tunisienne?
On voit dans le film un meeting, et une femme sur le podium demander que les femmes enlèvent le voile. C'étaient les années trente. Le plus drôle, celui qui dit qu'il est trop tôt pour cela est un jeune homme du nom de Habib Bourguiba. Celui-là même qui quelques années plus tard enlèvera le voile de la femme tunisienne.
Cela m'a fait sourire. Nous sommes en 2008, et en Tunisie, nous débattons encore du problème du voile. Mais paradoxalement, nous en discutons actuellement parce que certaines veulent le porter à nouveau!
Que dirait Habib Bourguiba aujourd'hui s'il voyait cela?
Autre chose qui à mon avis n'a pas évoluée depuis les années trente: l'intolérance.
Tahar Haddad écrit un livre révolutionnaire pour l'époque. Que se passe-t-il?
Une campagne de dénigrement se met en place. Il est rejeté par presque tous. Il est accusé d'hérésie, de kofr... Il est mis au ban de la société. Il est renvoyé de son emploi. Certains ont réclamé que son livre soit brulé... En fait, c'est encore ainsi que cela se passe, non? Sauf que peut-être aujourd'hui, il y aurait en plus une fatwa à son encontre!
Les idées de Tahar Haddad seront quand même reprises lors de la rédaction du Code du Statut personnel Tunisien.
Mais l'absence féminine dans le film nous montre aussi que les droits de la femme tunisienne n'ont pas été arrachés par elle, ils lui ont été donnés par des hommes qui se sont battus à sa place. Après le film, j'ai eu l'occasion de discuter un peu avec Youssef Seddik, lui aussi présent à cette projection. Monsieur Seddik semble très très pessimiste quant à l'avenir de la condition des femmes tunisiennes, auxquelles il reproche de ne pas avoir été des féministes réclamant leurs droits, et donc n'accordant pas assez d'importance à ces droits qui leur ont été offert par des hommes. D'après lui, dans une trentaine d'années, la femme tunisienne, si elle reste toujours aussi effacée et inerte, aura perdu tous ces droits qui lui semblent des droits acquis mais qui tendent à disparaitre. J'espère de tout cœur qu'il a tort, j'espère que ma fille, et ses futures filles, vivront dans un pays où la femme est une citoyenne et une personne à part entière, jouissant des mêmes droits et soumises aux mêmes obligations que les hommes. Malheureusement, parfois, en observant le comportement de certains de mes compatriotes, j'ai moi aussi des craintes.
Dans le film, le réalisateur insiste aussi sur la guerre des clans, sur les "guerres intestinales", sur la koffa et les kaffèfas, sur ceux qui, proches du pouvoir, essayent de s'y maintenir pour conserver leurs privilèges.... Tout cela n'a pas changé non plus. Mais cela est peut-être inhérent à l'être humain. Pendant des siècles, les êtres humains ne se sont-ils pas toujours comportés ainsi?
Je reviens à Bourguiba. On le retrouve fougueux, décidé, fin stratège, instruit..., mais aussi opportuniste, coléreux... Et MODERNE. D'ailleurs, il était le seul personnage du film à être BILINGUE. Il parlait aussi bien en Arabe qu'en Français.
Je reproche au film d'avoir négligé un petit détail: Bourguiba était connu pour son regard bleu. Un bleu limpide. Or l'acteur qui jouait le rôle avait des yeux noirs. Pourquoi ne pas lui avoir fait porter des lentilles bleues. Cela était-il intentionnel ou bien juste un oubli?
A ce sujet, concernant les détails, j'aurais des reproches à faire au décorateur et à l'accessoiriste du film: quelques fautes comme la théière marocaine. Où sont donc nos théières tunisiennes? Si difficiles à trouver? D'autres exemples de ce genre dont je ne me souviens plus. De même, des anachronismes, telle cette lampe en plastique bleue au désign très moderne. Que fait-elle donc dans un film supposé raconter les années trente?
Par contre, "détail" qui m'a amusée: à un moment, on voit un tableau. Je le reconnais tout de suite. Je dis à mon amie: "regarde, il s'agit d'un tableau de Roubtzov". Effectivement, la scène se passait chez Alexandre Roubtzov. Cela m'a fait plaisir de "rencontrer" un de mes peintres préférés dans un film.
En conclusion, bien que peut-être pas parfait, je trouve ce film très intéressant et à voir absolument. Personnellement, il m'a "parlé".
Il y a environ 3 jours, je suis tombée sur cette note, complètement par hasard, publiée sur facebook. Du coup, je suis allée lire plusieurs notes écrites par la même personne. Et j'avoue avoir beaucoup apprécié ce que j'ai lu.
Je lui ai écris un message lui demandant s'il avait un blog, et lui demandant l'autorisation de publier sa note sur le mien.
Malheureusement, il n'a pas de blog, mais il m'a permit de publier sa note, à la condition que je ne dévoile pas son identité.
Ses amis facebookeurs reconnaitront quand même cette note puisqu'ils l'ont peut-être déjà lue sur facebook.
Et j'espère qu'il viendra répondre à vos éventuels commentaires et/ou questions.
Religions, idéologies, conscience et humilité
Pourquoi est-il si difficile de dialoguer avec les religieux et les idéologues ? (je précise que religieux ici ne veut pas dire croyants mais ceux-beaucoup plus nombreux que l'on pense- dont la religion est un capital social et/ou un fond de commerce duquel ils tirent statut et/ou pouvoir : les "je sais mieux que toi", les "khayra ommatin" et autres "peuple élu" , de la même façon qu'idéologues ne veut pas dire personnes ayant des idées ;) ).
Le religieux et l'idéologue n'aiment pas dialoguer en dehors de leurs propres référentiels et certitudes ... Leur croyance n'est pas matière à réflexion et à débat et parce qu'ils sont imbus de leur supériorité et de la supériorité de leur version de vérité.
Alors comment contenir les tentations extrémistes et totalitaires ? Certains croient que la seule façon de modérer ou de faire évoluer les choses est de faire évoluer les systèmes de l'intérieur sans heurter les pensées dominantes. Pour eux, c'est acquis, on ne peut parler au religieux d'égal à égal que lorsqu'on est dans le même référentiel de croyances et d'idéologies... Autrement dit avant de négocier il faut signer une reddition ... Est ce bien raisonnable ? Est ce bien acceptable ? N'est ce pas là une forme de lâcheté et de paresse intellectuelle ? N'est ce pas surtout un encouragement qui conforte encore plus le croyant ou l'idéologue dans leur manque d'ouverture, de conscience critique et d'humilité ?
Accepter le principe qu'on ne peut discuter et faire évoluer une religion ou une idéologie qu'en étant à l'intérieur de ses lignes rouges (encore faut-il bien les définir dans la pensée du moment) c'est accepter le fait que les vérités des autres ne sont pas équivalentes en valeur puisque celui là même qui réclame à cors et à cris le respect de ses lignes rouges et de ses croyances est incapable de regarder la pensée différente autrement que comme une pensée inférieure ou impure. Accepter les lignes rouges d'en face sans réciprocité, c'est le champ libre à ce que les dominants ou aspirant à dominer rêvent toujours d'imposer aux autres : la capitulation. C'est un champ ouvert vers le totalitarisme, le sectarisme et l'inquisition ...
Toutes ces vérités qui se veulent absolues et qui se valent au moins dans ce désir sont la braise de tous les feux qui consument le monde.
Le monde a besoin d'un contre-pouvoir et de gardes-fous (au vrai sens du terme). C'est un besoin collectif et c'est l'intérêt de tout le monde croyants ou pas. Ces gardes-fous ne peuvent être qu'à l'extérieur des dogmes, ces derniers devant avoir leurs propres soupapes de sécurité pour éviter l'aveuglement, l'enfermement et l'intolérance.
Le jour où j'ai mis les pieds en France, j'ai compris ce que croyance veut dire parce que j'ai été au contact d'autres croyances que j'ai toujours ignoré et à la limite vaguement considéré auparavant comme inférieures à la mienne (c'est ce qu'on nous apprend) et j'ai tout de suite compris que les personnes d'en face croient dur comme fer qu'il n'y a de Dieu que leur Dieu et que seule leur croyance est la vraie vérité ... J'ai appris depuis en m'intéressant à l'Histoire que les religions d'hier n'étaient guère différentes et que leurs tenants étaient aussi sûrs d'eux que nous puissions l'être de nous mêmes aujourd'hui ...
Quoiqu'on prétende, un musulman ne peut pas encore accepter que sa vérité soit toute aussi imparfaite et relative que celle du bouddhiste, de l'hindouiste, de l'animiste ou du laïc. De même un sunnite considérera sa religion plus vraie que le shiite et un wahabite verra un sunnite classique comme un mauvais musulman qu'il faut mettre en camp de rééducation ... Ce qui est dit ici de l'islam est aussi vrai du judaïsme ou du christianisme, voire même des petites sectes nées d'hier ou même du capitalisme, du libéralisme, du communisme ...
L'Islam étant ma religion, c'est lui qui m'interpelle et me concerne le plus et c'est lui qui me peine de se trouver aujourd'hui en prise avec des courants extrémistes, totalitaires, abrutissants et brutaux et c'est lui qui me peine de se trouver dans la tentation de l'isolationnisme et du repli.
On peut toujours attendre un Ibnou Khaldoun ou un Ghazali pour faire émerger un Islam des lumières et de l'ouverture mais c'est vaine attente lorsqu'on considère l'histoire et les forces actuelles en présence. Car si Ibn Khaldoun ou Ibnou Rochd étaient nés de notre époque, ils auraient une fatwa de takfir et de mort sur de dos depuis longtemps et seraient probablement enseignants à Berkley ou à La Sorbonne sous protection policière ...
La chape de plomb de 14 siècles est trop lourde pour être soulevée par un individu aussi brillant et pertinent soit-il. Le salut ne peut être que collectif ... et le collectif commence par l'individuel et sa massification ... La masse chez nous, ce sont des individus encore sous tutelle ... Une masse qui a appris à lire et écrire ces dernières années et qui est encore loin de pouvoir penser sa réalité ou prendre son destin et son avenir en main. Aujourd'hui encore, pour beaucoup de nos coreligionnaires, décider avec son cerveau de comment s'habiller semble encore une bid3a, une audace inadmissible ... Alors ????
On est très loin. On l'est parce qu'on vient d'encore plus loin ... et on l'est parce que nous sommes enchaînés et constamment tirés en arrière par les évènements politiques et géostratégiques que nous subissons comme une malédiction.
Ma vision personnelle est que le salut collectif est d'abord dans la prise de conscience individuelle et immédiate de la nécessité de nous réveiller et de nous éveiller pour devenir des êtres pensants, conscients et ouverts sur notre monde ... il faut oser vouloir l'être ... oui je dis bien oser vouloir.
Ce que chacun de nous doit chercher c'est l'éveil à la conscience de soi, de son histoire, des autres et du monde pour renouer les fils et trouver une cohérence entre ses croyances, sa réalité et ses aspirations, entre soi et les autres, entre ici et ailleurs, entre aujourd'hui et hier.
Encore faut-il avoir la volonté, le courage, le temps, la capacité et l'énergie pour creuser au delà des apparences et remonter le fil de l'histoire, de la sienne propre et de celle de ses semblables. Un long voyage mais qui en vaut certainement la peine et les peines ...
Le problème c'est que le voyage dans l'autre pente est beaucoup plus facile. La pente est glissante, nos pieds savonnés depuis tout petits, et les mouvements de foule aveugles nous poussent dans le mauvais sens ...
Malgré tout ça, il me semble dans l'ordre naturel des choses que l'humain évolue et que la conscience prenne le dessus sur les réflexes, à la longue. Peut-être est ce une déformation de mon background de biologiste ... Mais non ... Car lorsque je regarde l'intelligence des enfants d'aujourd'hui, mon espoir grandit ... A six ans ils commencent à parler plusieurs langues, s'éveillent à la diversité du monde, de ses paysages, de ses créatures, et de ses populations, connaissent les dinosaures par leurs noms, connaissent l'histoire des chevaliers et des pirates, connaissent les planètes, ...
Le mouvement de l'esprit humain est irrépressible sur le long terme. Dieu a bien fait la nature et le vivant. Le langage avec lequel il a écrit les atomes, les molécules et les gênes est de loin plus puissant et plus juste que les langages humains imparfaits dans lesquels nous tentons de dire nos vérités et nos croyances que nous voudrions pourtant parfaites, ou du moins plus parfaites que celles des autres ... Pas simple tout ça .... mais qui sait ???? La conscience de la complexité est probablement le début du grand voyage de l'humilité.
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