"Mon nom est Zakaria, j'ai cinquante ans et je suis écrivain. Écrivain dans un pays où ne sont éditées que des œuvres asexuées, gommées de toutes aspérités caractérisant la pensée individuelle. L'entreprise d'État qui avait le monopole de l'édition depuis l'indépendance jusqu'aux évènements du 5 octobre 1988 a pendant longtemps publié les essais ou récits que je rédigeais en plus de mon métier de journaliste. Je faisais partie de l'équipe de rédaction du Révolutionnaire, un quotidien dont le pouvoir était le rédacteur en chef. J'allais d'écoles en universités pour donner des conférences et parcourais le territoire afin de réaliser des reportages. Mes chroniques vantaient les performances industrielles, la construction de barrages ou de villages agricoles ultramodernes "réalisés en des temps records grâce à des équipes entièrement algériennes". En thuriféraire patenté, je brossais sans vergogne et dans le sens du poil les qualités "hors normes" du Président, des ministres ou de n'importe quel abruti national érigé en Secrétaire Général d'une section du Parti Unique perdu dans le fin fond du bled. Ce n'était ni de la servitude ni de la lâcheté. C'était pire: de la sincérité. Emporté par le souffle révolutionnaire qui régnait en main de maître à cette époque, je taisais et écrasais volontairement ma subjectivité. On avait réussi à me faire croire qu'elle était un état d'âme bourgeois. J'écrivais alors des textes à vocation populiste qui, au nom de la sacro-sainte devise nationale "Un seul héros: le peuple", louaient la vaillance de la plèbe et la sublime clairvoyance des autorités guidant ses élans héroïques.
Au début des années quatre-vingt, quand l'idéologie socialiste commença à battre de l'aile, je me suis engouffré dans le mouvement suscité par les réformateurs qui, de l'intérieur du régime, fustigeaient les autorités, les accusant de trahir les idéaux révolutionnaires pour détourner richesses et privilèges à leurs seuls profits. Alors, dans un langage et un excès de zèle inconnus de moi jusque-là, je me suis insurgé pour dénoncer avec force et détermination les massacres commis par l'armée pendant les évènements du mois d'octobre 1988. Près de six cents victimes parmi les Gavroches de la révolte populaire. Je l'ai payé cher. Après les évènements, mes écrits furent d'abord charcutés puis censurés. La direction du journal mit fin à mes fonctions en me confiant un poste à responsabilités de pacotille dans l'administration du ministère de tutelle, pour "services rendus à la Nation"."
Fellag - L'allumeur de rêves berbères.
merci merci, je v vite acheter et lire
Rédigé par : 24faubourg | 14/04/2009 à 17:51
Ah, c'est bizarre, j'ai moi aussi fait un post sur Fellag (cliquez sur mon pseudo pour voir). Un peu moins laudateur cependant lol ! Mais le contexte qu'il décrit ici est vraiment celui de l'Algérie des années socialistes...
Rédigé par : Naravas | 15/04/2009 à 00:19
Sans pour autant porter un jugement sur la personne, mais après plus que vingt ans de léchage obstiné, c'est un peu douteux !
Rédigé par : Zorboustra | 15/04/2009 à 10:33
Bonjour, c’est celui qui arrive toujours en retard parce qu’il n’est pas le premier venu.
Reprenons :
Ce n’est pas seulement douteux comme dit Zorb, c’est carrément indécent. As t il payé pour ses errements, pour les injustices qu’il a pu causer, pour les vies qu’il a pu détruire. Voudra t il d’un tribunal pour juger ses actes ? Il ne suffit pas d’un coup de badigeon pour cacher la honte d’un peuple envers lui-même. Les algériens ont sacrifiés l’Algérie. Il est grand temps qu’ils se réveillent et rendent compte.
Après tout Fallaq ne signifie t il pas destruction ?
Bien a vous chers amis.
MALI
Rédigé par : MALI | 15/04/2009 à 15:39
Bonne lecture!
Rédigé par : Massir Destin | 21/04/2009 à 01:41
et c'est la description de nos journalistes tunisiens actuels!
Rédigé par : Massir Destin | 21/04/2009 à 01:42
Ne voyez-vous pas dans cette description la description de nos journalistes tunisiens boudourou?
Rédigé par : Massir Destin | 21/04/2009 à 01:45