Je viens d'écouter la chanson de Farid El Atrache Ya habaybi ya ghaybine, cela m'a ramenée des années en arrière, lorsque j'étais étudiante en France. J'avais du l'écouter des milliers de fois parce qu'elle traduisait parfaitement mon état d'âme de l'époque. Ma famille et mes amis me manquaient cruellement. Je me rappelle qu'il m'arrivait de pleurer à l'écoute de cette chanson et de la chanson ya sitt il habayib de Faïza Ahmed.
Le plus dur lorsque l'on s'éloigne de chez soi est d'être séparé de ses proches.
Je me rappelle que je comptais les jours qui me séparaient des vacances pour rentrer à la maison. Mais le plus drôle, c'est que 4 à 5 jours après être rentrée à Tunis, je comptais les jours pour repartir en France!
L'être humain n'est jamais vraiment satisfait!
Paroles Farid El Atrache Ya Habaybi Ya Ghaybin
ياحبيبى ياغيبين وحشنى ياغالين لو اغمض وافتح ولاَئيكم جاين
ياحبيبى من يوم مابعدنا ولا شئ فى الدنيا بيسعدنا ولا ورده بتزوق بتنا ولا شمعه بتنور عدنا
ياحبيبى ايامى فداكم انسى فرحنا ومانساكم
والله والله والله وكمان والله انا صبح وليل بستناكم
Un menteur et un traitre restera toujours menteur et traitre. Quoiqu'on fasse, il mentira quand même. On peut essayer de lui faire confiance, il mentira. Il peut pleurer, promettre, jurer qu'il ne le refera plus, il ne faut pas le croire parce qu'il mentira quand même. Un menteur reste toujours un menteur! Que faire face à cela?
Papa, maman, vous m’avez appris que le mensonge et l’hypocrisie étaient des défauts. Vous m’aviez dit que la malhonnêteté est très grave. Que l’on ne doit jamais tromper les autres, ne jamais les trahir… Vous m’avez dit que les gens biens étaient ceux qui avaient des principes. Que les règles de la morale ne devaient jamais être transgressées….
Papa, maman, vous m’avez trompée.
On me dit aujourd’hui que la franchise, la sincérité, l’honnêteté sont des défauts. On me dit qu’il faut que je change. On me dit que je dois mentir. On me dit qu’il faut être hypocrite. On me dit que parfois il faut savoir être malhonnête, trahir, tromper…
On me dit que le fin justifie les moyens. On me dit que pour vivre dans notre société, il faut savoir s’adapter. On me dit que de nos jours avoir des principes est un handicap. On me dit que des notions telles que l’amitié, l’amour, la morale sont des leurres…
Papa, maman, on me dit tellement de choses!
Papa, maman, on me dit que je ne sais pas vivre dans notre société. On me dit qu’il faut que je change sinon je risquerais d’être exclue.
On me dit que la fidélité, l’amitié… sont inexistantes. Qu’on ne les trouve qu’au cinéma ou dans les films….
Papa, maman, on me dit tellement de choses!
Papa, maman, on me dit tout à fait l’inverse de ce que vous me disiez.
Papa, maman, pourquoi m’avez-vous trompée?
Papa, Maman, pourquoi m’avez-vous raconté toutes ces choses fausses?
Papa, maman, pourquoi?
Papa, Maman, pourquoi m’avez-vous faite ainsi?
Papa, maman, dites-moi pourquoi?
Papa, maman, vous a-t-on trompé vous aussi?
Papa, maman, vous ne saviez pas?
Papa, Maman, que dois-je faire aujourd’hui?
Vous écouter?
Les écouter?
Qui a tort?
Qui a raison?
Et aujourd’hui, dites-moi, papa, maman, que dois-je dire à mes enfants? Que dois-je leur apprendre?
Et moi, dois-je changer?
Papa, maman, je n’y arrive pas. Je suis perdue entre ce que vous m’avez appris et ce que l’on me dit aujourd’hui. Je suis perdue. Vraiment perdue.
Mais si je les écoute, ne me perdrais-je pas encore plus?
Waow. C'est génial. Je n'ai été créée que pour être une attraction destinée aux hommes!!!!
Eh, vous qui depuis des années me dites que les hommes et les femmes sont pareillement des êtres humains, qui me dites que nous sommes égaux, que nous avons les mêmes droits et obligations, que nous pouvons faire le même métier, que nous avons les mêmes capacités intellectuelles.... pourquoi vous ne m'avez pas dit que j'étais destinée biologiquement et par nature à être une attraction pour les hommes????
Pourquoi donc m'avoir fait perdre de longues années sur les bancs des écoles, des lycées, de la fac... alors que je n'étais destinée biologiquement et par nature qu'à distraire un homme?
Pourquoi m'avoir fait perdre du temps à lire, à apprendre, à travailler... alors que je n'étais destinée biologiquement et par nature qu'à servir d'attraction à un homme?
Pourquoi m'avez-vous fait croire pendant de longues années que j'avais un corps, propre à moi, et qu'il fallait que ce corps me serve à moi, alors que biologiquement et par nature, il ne devait servir qu'à satisfaire un homme?
Pourquoi pendant de longues années m'avez-vous fait croire que les femmes avaient le droit d'avoir une sexualité propre, d'avoir du désir et du plaisir, alors qu'en fin de compte, elles sont destinées biologiquement et par nature à juste satisfaire la libido d'un homme?
Ne peut-on donc faire confiance à personne dans ce fichu pays? A qui parler sans craintes? Avec qui peut-on se lier sans encourir de risques? A qui peut-on se confier sans représailles? Comment un ami peut-il être l'ami d'un ennemi? Que de questions!
J'aimerais partir loin, très très loin, loin de ce pays aussi grand qu'un tout petit village, où tous se connaissent et où je ne trouve plus la paix!
Hier, je regardais Maktoub (suite à toutes les discussions et polémiques concernant ce feuilleton, je m'y suis mise moi aussi depuis 4/5 jours).
On nous a toujours montré Samia (l'épouse trompée) comme la victime (et c'est en effet ce qu'elle est réellement). Elle a subi son mari, ses infidélités...
Sa belle-mère l'adorait, et passait son temps à dire qu'elle était une fille bien, une mra 3a9la(1)...
Cette femme a enfin eu le courage de quitter son con de mari. Et elle veut utiliser les moyens mis par la loi à sa disposition pour préserver les intérêts de son fils.
Que fait la belle-mère?
Elle se retourne contre elle, et va jusqu'à dire du mal d'elle. Elle dit entre autres que les bnat 3ayla(2) n'agissent pas ainsi.
Ah bon?
Que doivent donc faire les bnat 3ayla?
Subir et se la boucler?
C'est ce que veut notre société?
Une bint 3ayla n'a-telle donc aucun droit?
Quoiqu'on lui fasse, elle doit se la boucler?
Cela m'énerve et me casse les pieds. Je ressens cela comme une injustice.
Depuis quelques mois, une personne proche s'est mise dans la tête de me pourrir la vie. Tout le monde le voit et personne ne réagit. Et on me lie. On ne me laisse ni me défendre ni rétorquer. Déjà que je ne sais pas réagir face à la méchanceté et à l'hypocrisie, mais en plus, on me demande de faire celle qui ne voit rien. Comment faire? Cela dure depuis des mois, et je n'en vois pas la fin.
On me dit que je suis une bint 3ayla, une mra 3a9la, wi koun la39al minni(3)... Discours classique.
Mon propre mari me dit qu'il sait que je suis madhlouma(4), mais il ne fait rien. Il ne prends pas ma défense pour ne pas créer de problèmes supplémentaires. Et cela me fait enrager encore plus.
Ok, mais moi?
Dois-je aussi me la boucler pour ne pas faire de vagues?
Est-il normal qu'on laisse le dhalim(5) agir à sa guise parce que bnat il 3ayla ne doivent pas réagir?
Je veux bien faire plaisir, je veux bien éviter de créer des problèmes... ok, mais 7a99i ana(6)? Qui va s'en charger?
Que l'on me dise que j'ai raison, mais que je ne dois pas me défendre, me met en colère. Cela commence à vraiment me faire mal. Mais on me dit de ne rien faire. Je suis une bint 3ayla. Et alors????
Jusqu'à quand?
Et pourquoi personne ne vient dire à cette personne que les bnat et wwled 3ayla ne doivent pas faire du mal à autrui. Pourquoi est-ce seulement à moi que l'on dit cela?
Suite à ma note « La douleur de l’infidélité » et à 2 commentaires [(1) & (2)] que j’ai reçus, j’ai envie de réfléchir un peu avec vous et avoir votre opinion sur le sujet.
La première, Brise tunisienne se demande si je suis d’accord ou si j’ai été convaincue que la réaction de l’épouse est la bonne, ou du moins, qu’une bonne épouse se devrait d’être aussi passive et «compréhensive».
Que pourrais-je dire?
Il y a quelques années, j’aurais répondu sans aucune hésitation. Avec ma fougue d’antan, mes idées, mes principes d’égalité des sexes, etc., j’aurais dis NON NON NON. L’épouse aurait du agir, c’est à dire hurler, crier, et s’en aller.
Pourquoi aujourd’hui ma réponse n’est-elle pas aussi évidente?
Parce que les années ont passé et que les choses ne sont plus pour moi aussi tranchées.
En fait, je regarde autour de moi, j’observe les femmes qui ont divorcé et celles qui se sont résignées. Lesquelles ont fait le meilleur choix?
Je ne sais pas. Je ne sais pas du tout.
Il y a quelques années, je discutais avec une parente. Elle avait été mariée juste quelques mois. Et pendant ces quelques mois, je pense qu’elle n’a connu aucun jour heureux avec son mari. Ensuite, il a eu le toupet de la tromper. Pourquoi toupet? Parce qu’ils venaient à peine de se marier.
Elle a été acculée au divorce. Elle n’avait pas d’autre choix. En plus, elle était jeune, elle était belle, elle était instruite et elle était riche. Objectivement, on aurait pu penser qu’elle se serait remariée bien vite.
Pas du tout. 14 ans après, elle vit toujours seule dans une solitude absolue. Et elle commence à se faner.
Quant à son mari, il s’est remarié deux fois, et a divorcé deux fois. Sa 2eme femme lui a fait un enfant.
Cette parente qui n’a jamais connu le bonheur conjugal m’avait dit un jour: «tout est mieux que la situation de femme divorcée. Tout. Si j’avais su, j’aurais tout accepté, je n’aurais jamais divorcé». Sincèrement, ces quelques phrases m’avaient et me font toujours frémir. Le divorce est-il quelque chose de si terrible pour une femme tunisienne?
Ensuite, au fil des années, j’ai eu d’autres témoignages qui allaient dans ce sens.
Telle cette jeune femme, mariée vers 17 ans à son amoureux. Une fille. Et un jour, elle rentre chez elle, et trouve son mari au lit avec sa copine. Divorce. Les années ont passé. La petite fille va bientôt se marier à son tour. Le père s’est aussi remarié depuis des lustres. Il a eu d’autres enfants.
L’ex-épouse vit toujours seule. Elle a aujourd’hui 43 ans. Cela fait bien plus de 20 ans qu’elle a divorcé. Elle est très jolie. Elle a eu plusieurs prétendants, mais aucun d’eux n’a voulu d’une «second hand».
Une autre femme, aujourd’hui 57 ans. Elle avait été trompée par son mari un nombre incalculable de fois. Il faisait dans tout ce qui bougeait. Ils se sont séparés à plusieurs reprises. Elle avait pardonné à chaque fois… jusqu’à la fois de trop. Il y a environ 3/4 ans, elle a fini par divorcer définitivement. Il y a deux jours, elle m’a dit qu’elle regrettait. D’après elle, si elle pouvait revenir en arrière, elle fermerait bien fort les yeux sur les infidélités de son mari.
Cette femme n’a pas besoin de son mari matériellement. Et elle est bien entourée de sa famille. Elle est aujourd’hui grand-mère. Elle s’occupe de ses petits enfants. Pourtant, elle m’a dit qu’elle regrettait. Elle dit que depuis son divorce, sa vie est devenue misérable, et que rien ne pourrait remplacer un homme dans la vie d’une femme.
Je lui ai d’ailleurs fait lire ma note et les 2 commentaires qui ont suivi. Elle a sourit en disant que la douleur et la souffrance décrites étaient bien réelles, qu’elle les avait vécues exactement telles que décrites, mais qu’elle regrettait quand même son divorce.
Une autre femme. Environ 55 ans. 3 grands enfants aujourd’hui. Je l’ai toujours connue divorcée, et j’avoue ne lui avoir jamais demandé la cause de son divorce, mais l’autre soir, parlant du livre d’Albert Memmi, elle m’avait dit qu’elle comprenait, qu’elle était passé par-là, qu’elle s’était révoltée et avait divorcé, et qu’aujourd’hui, elle regrettait amèrement. Elle a même ajouté qu’elle essayerait par tous les moyens d’empêcher toute femme qui voudrait divorcer pour adultère de le faire.
Et j’en passe, et des meilleures. Je ne peux me souvenir de tous les cas ni les relater tous. Mais ces femmes m’intriguent: le divorce est-il une chose si affreuse pour une femme tunisienne?
Vaut-il mieux fermer les yeux sur les infidélités d’un mari? Je trouve cela révoltant et injuste. Complètement injuste.
Ce qui est encore plus injuste, c’est qu’un homme divorcé pourrait se remarier le lendemain même de son divorce s’il le voulait. Avant même que le divorce soit prononcé, il y a une foule de femmes qui attendent pour l’épouser. Surtout, surtout s’il est riche, même juste un petit peu.
Par ailleurs, je vois aussi des femmes qui comme Allégra, se résignent et restent. Pour différentes raisons d’ailleurs. Certaines par amour, d’autres pour l’argent, d’autres encore pour les enfants, certaines par lâcheté, d’autres pour le confort…
Ces femmes sont-elles malheureuses?
Je ne sais pas.
Par contre, je me demande où elles trouvent la force de rester et de fermer les yeux.
Elles ne ferment pas toutes vraiment les yeux d’ailleurs, ou ne se résignent pas toutes. Certaines s’accommodent de certains arrangements, d’autres se vengent en prenant à leur tour des amants…
Qui a tort? Qui a raison? Y a-t-il une solution idéale?
Je ne sais pas.
Et je ne sais pas d’ailleurs si on peut répondre à de telles questions lorsque l’on ne vit pas la situation.
Il y a quelques temps, un ami a trompé sa femme. La maîtresse s’était arrangée pour que l’épouse l’apprenne. Elle la provoquait presque. Elle voulait qu’éclatent des disputes dans le couple pour qu’ils divorcent et qu’elle puisse enfin épouser son amant.
Je ne sais où l’épouse a trouvé la force de rester stoïque, digne et calme. Elle a fait la sourde oreille. Elle avait pleuré toutes les larmes de son corps, mais elle n’avait jamais dit un seul mot à son mari. Pas le moindre reproche. Elle a tenu des mois, jusqu’à ce que la maîtresse finisse par perdre patience, et elle a enfin pu récupérer son mari.
Est-elle heureuse aujourd’hui?
Elle en l’air.
L’est-elle vraiment au fond d’elle-même?
Je ne sais pas. Je suppose que rien ne peut redevenir comme avant.
Je l’avoue, parfois, j’ai de l’admiration pour sa force de caractère, mais parfois aussi, j’ai envie de la frapper pour sa résignation. Mais en fait, a-t-elle bien ou mal réagit?
Elle a quand même pu préserver son foyer, sa famille, et elle a fait fuir la maîtresse. Mais quid de son amour envers son mari, de sa fierté, de son amour propre. Elle est tellement discrète que je n’ai jamais, et je n’oserais jamais lui poser de questions à ce sujet.
Je connais une autre femme qui n’est pas partie. Mais la relation de son mari avec sa maîtresse a duré pendant 19 ans. 19 ans de calvaire pour elle. Mais avait-elle le choix? Il s’agit d’une femme de l’ancienne génération. Celles auxquelles on disait qu’une femme respectable ne divorçait jamais.
J’en connais une autre. Mon âge. Elle était dans le même lycée que moi. Elle s’est résignée. La tristesse se lit sur son visage. Elle est malheureuse. Pourquoi n’a-t-elle jamais divorcé? Je ne sais pas. Peut-être une histoire de gros sous, son père et son mari étant associés. Mais le comble, c’est que son mari a contracté un mariage orfi (qui n’est pas légal en Tunisie, je le rappelle) avec sa maîtresse, et lui a même fait des enfants. En fait, c’est un cas de bigamie comme il en existe de plus en plus en Tunisie. Mais pourquoi accepte-t-elle? Et surtout comment fait-elle pour vivre cette situation?
Je ne veux bien-sur pas dire d’après mes exemples que toutes les femmes qui divorcent restent malheureuses jusqu’à la mort. Certaines ont refait leur vie et sont bien plus heureuses avec leur second mari. Mais proportionnellement, que représentent ces femmes par rapports à celles qui n’auront plus jamais cette chance?
Toujours est-il que ma réponse est: JE NE SAIS PAS, ou plutôt, JE NE SAIS PLUS.
Peut-être que c’est au cas par cas. Je ne sais pas. Peut-être que cela dépend des tempéraments, des caractères, des situations…
Qu’en pensez-vous?
P.S.: Cela serait bien d’avoir des témoignages d’hommes aussi. Surtout pour répondre à la question de Soraya: Finissent-ils tous, tôt ou tard, par infliger ce type de vacheries?
J’ai lu, dernièrement, le livre d’Albert Memmi ((1) (2)), «Le Pharaon». En couverture il est dit que ce livre «relate la rencontre avec l’Histoire, l’émergence stupéfiante de la nation tunisienne. S’y insère une aventure amoureuse qui, malgré ses emportements du cœur et de la chair, ne pâlit pas devant la violence de l’Histoire…».
Pour moi, ce n’est pas vraiment cela que relate le livre. Je dirais plutôt qu’il s’agit d’amour, d’une histoire d’amour essentiellement, et qui accidentellement se passe en Tunisie lors de la lutte pour l’indépendance.
Il est vrai qu’on y parle un peu des mouvements patriotiques, des fellaghas, de Bourguiba, de Mendés France… D’ailleurs, on remarque à quel point l’auteur admire Bourguiba, et je ne lui donnerais pas tort sur ce plan.
Mais pour moi, comme je l’ai dis plus haut, il s’agit surtout d’une histoire d’amour. Une banale histoire d’amour entre le mari, la femme et la maîtresse. L’éternel trio infernal en fait.
Lorsque je dis «banale», je ne veux pas dire que cette histoire est banale, je veux simplement dire que de nos jours, de telles histoires sont tellement nombreuses qu’elles en deviendraient banales.
Armand est un homme d’un âge certain. Il mène une vie routinière, réglée comme du papier à musique, entouré de sa femme, de son associé, de ses enfants… Lorsqu’un jour, entre dans sa vie une jeune femme.
Nous assistons dans ce livre aux bouleversements, bonheurs, souffrances… que cette rencontre va occasionner à Armand. Armand pour qui cette rencontre est une occasion de tout recommencer, une renaissance en fait.
Armand se remet donc en question. Il remet tout en question, sa vie, ses attentes, ses relations avec ses amis, sa famille, son travail… Tout en fait. Tout est chamboulé par cette rencontre.
Cette jeune femme va tomber amoureuse d’Armand. Est-ce pour elle une façon de remplacer son père absent?
Quoi qu’il en soit, elle deviendra vite exigeante, elle voudra plus, toujours plus d’Armand.
En ce qui me concerne, je n’ai pu avoir aucune sympathie pour cette jeune femme. Pour moi, elle est l’intruse, la pièce rapportée, l’empêcheuse de tourner en rond… Celle par qui les souffrances arrivent…
Je ne peux avoir aucune empathie ni sympathie pour une personne si égoïste: elle arrive, elle veut, elle exige… A-t-elle même pendant quelques secondes pensé à l’épouse et aux enfants de son amant? Pas du tout. Elle veut Armand, point à la ligne. Elle n’a pensé qu’à elle-même, à ses désirs, à l’amour qu’elle pense porter à Armand… Peu importent les conséquences. Et c’est cela qui me révolte dans ce genre d’histoires. Les maîtresses ne pensent qu’à elles-mêmes, jamais aux autres.
L’auteur essaye de nous dire qu’elle n’est peut-être elle-même que la «conséquence» de son enfance: une mère infidèle qui un jour l’a abandonnée, un père qui souffre de cet abandon et qui sera stricte et absent…
Pour moi, les deux personnages les plus importants sont Armand et son épouse, Allégra. En fait, Le personnage le plus important est Armand, c’est à travers lui que nous verrons les autres personnages. Le livre relate les questionnements d’Armand, les pensées d’Armand, les souffrances d’Armand…
Armand est déchiré entre ses deux femmes. L’une, la jeune maîtresse, lui donne une nouvelle jeunesse, une impression de revivre à nouveau, une occasion de sortir de sa routine… mais au prix de grands déchirements et de sacrifices. L’autre représente un passé commun, un foyer, une famille, des enfants, des racines…
A la découverte de l’infidélité de son mari, la souffrance de l’épouse est intolérable. Je trouve que l’auteur a trouvé les mots justes pour la décrire. Cette souffrance immonde qui irradie dans le corps de l’épouse trompée. Cette souffrance sourde qui tort le ventre, qui arrête le cœur, qui fait mal, vraiment mal, un mal indescriptible. Cette souffrance oppressante, qui ne quitte plus le trompé, qui l’écrase, qui l’étouffe, qui le plie en deux, qui le fait hurler.
«Pour Allegra, la trahison d’Armand fut un coup de tonnerre; jamais auparavant, elle ne l’aurait crue possible; certes, tout parle d’infidélité, les livres, les films, les discussions avec ses amis, mais cela ne pouvait concerner que les autres.»
«C’était Allegra qui parcourait le couloir, montait et descendait l’escalier. Le somnifère n’avait pas agi; elle en avait pris un autre, en vain. Elle se tordait les mains de désespoir. - C’est affreux! Je ne sais que faire! J’ai la tête pleine de scènes horribles, toi avec cette putain…(…) - … cette salope! Cette voleuse! Je la tuerais! Tu verras que je la tuerai!…».
«L’état d’Allegra avait empiré. Elle maigrissait de façon alarmante… Elle dormait à peine; son somnifère habituel n’agissait presque plus, elle en doubla la dose sans effet notable. Entre deux crises de violence, comme un enfant qui a besoin d’être rassuré, elle implorait Armand. - Prends-moi dans tes bras! Tu m’aimes, n’est-ce pas? Il n’avait pas besoin de répondre, elle répondait à elle-même: «je sais que tu m’aimes.» Il la prenait dans ses bras avec un embarras où il ne savait distinguer entre l’évocation émue de leur amour enfui, le remords, la pitié et le sentiment d’une odieuse comédie. Elle s’assoupissait, mais cela ne durait guère, elle se réveillait en hurlant: «je vous vois! Je vous vois entrain de faire vos cochonneries! Elle est sur toi, l’ordure! La salope! La putain!». Même dans la journée elle n’arrivait plus à chasser de son esprit les images qui la torturaient…
«Elle ne voulait plus sortir de la Villa… mais ne supportant pas d’y être enfermée, elle faisait le tour du jardin, longeant la clôture comme un fauve, une aliénée prisonnière de ses angoisses.»
«N’ayant plus la force d’affronter la trahison d’Armand, Allegra entra dans le cycle médicamenteux des malades de la vie: tranquillisants, somnifères, euphorisants, excitants, calmants, etc. Elle exigeait qu’Armand restât avec elle à la Villa, où elle le soumettait à d’épuisants interrogatoires, le coinçait par des questions croisées, lui tendant des pièges où il finissait toujours par tomber, furieux de s’être laissé prendre en se jurant de ne plus lui répondre. Dès qu’il mettait un pied dehors, elle le traquait, le suivait à la trace. Sous des prétextes enfantins, elle téléphonait à la boutique, elle qui naguère n’en connaissait même pas le numéro par cœur. (…) Faisait-il mine de résister, marquer une pause, sur un mot, une phrase, souvent innocents, qui pussent se rapporter à leur drame, le visage d’Allegra se vidait de son sang, ses mains tremblaient et elle reprenait son air hagard, comme si elle fixait à l’intérieur d’elle-même quelque monstre horrible. Elle ne sortait de cette fascination muette que pour éclater en reproches, en accusations insensées….»
«La souffrance d’Allegra déborda, se répandit autour d’eux, se révéla à tous. Elle qui au début, avait si peur du ridicule ne cachait plus son malheur. Elle en parlait en public, avec cette ironie complaisante des romantiques qui affectent de mépriser la douleur pour mieux la braver. Elle décrivait son mal comme un abcès monstrueux, un mal pernicieux dont elle se trouvait affligée, et dont son époux était la cause persistante. Armand, honteux de ce rôle qu’il jouait malgré lui, ne savait comment mettre un terme à cette indécence.»
Allégra n’était pas la seule à souffrir de cette «tragédie» qu’est l’infidélité de son mari. Ses enfants aussi en souffraient. Et le plus étonnant, Armand aussi. Il en souffrait beaucoup. D’un coté, il se sentait fol amoureux de sa jeune maîtresse qui le sortait de sa routine, qui lui faisait oublier son âge, d’un autre coté, il ne pouvait se résoudre à quitter Allegra. Il s’en voulait aussi de la faire souffrir.
«… comment éviter la souffrance destructrice de l’autre? Comment affronter l’insupportable, l’incontournable souffrance d’Allegra? Fallait-il quitter Allegra, rester avec Allegra? Quelle serait la meilleure solution pour elle comme pour lui? Quitter Allegra la transformerait en une créature hagarde, aux gestes saccadés, à la bouche tordue. Comment prétendre aimer toute l’abstraite humanité si l’on accepte d’être le bourreau d’un être de chair et de sang? Comment repousser une femme qui nous tend les bras? N’est-ce pas l’enfant qui crie en elle?»
«… la souffrance la rendait folle. La fragilité intérieure d’Allegra fut la grande révélation de cette terrible période; elle fut aussi son arme et sa sauvegarde. Armand se demandait parfois si elle n’allait pas, dans l’une de ses crises, se livrer à quelque acte insensé, se fracasser la tête contre un mur ou se saisir d’un couteau. Il lui aurait pardonné, il lui pardonnait tout à cause de cette souffrance qu’il sentait en elle, et pour laquelle il se détestait et la détestait. «Comment puis-je la mettre dans cet état? ». «C’est la dernière fois, je ne recommencerais plus.» Mais il recommençait, il le savait, il ne pourrait pas s’en empêcher, et il serait encore rempli d’horreur contre lui-même et de colère contre elle d’avoir encore utilisé ce chantage si vulgaire.»
Il doutait de tout, il doutait de lui-même. Il ne s’occupait plus de ses enfants, il ne pouvait plus travailler…
Et le doute. Le doute pernicieux concernant sa maîtresse si jeune. Un jour, elle le quitterait. Un jour, lorsqu’il sera vieux, où lorsqu’elle ne l’aimera plus. Un jour… Peut-il même être sur de sa fidélité? Non. Elle le lui a même dit.
Alors qu’Allégra… «… moi, je ne te quitterais jamais, parce que moi, je t’aime. Je t’ai aimé depuis que je t’ai vu à Paris, je n’ai jamais cessé de t’aimer même lorsque je te détestais.
Armand du convenir qu’il n’en avait jamais douté, même s’il n’y prêtait guère attention, comme on est certain de posséder un bien sans avoir besoin de le vérifier sur l’acte notarié. Il eut presque envie d’exprimer sa gratitude à Allegra.»
Et si Allégra avait, elle aussi, trompé son mari?
« -Si je l’avais fait, tu ne l’aurais pas supporté, ajouta Allegra comme si elle avait deviné sa pensée.
Il dut convenir qu’elle avait raison; il en aurait souffert. Il ne se permettait de telles audaces que parce qu’il les savaient gratuites. Allegra supportait tout ce qu’il lui faisait endurer, parce qu’elle l’aimait. Il n’en avait jamais vraiment douté. (…) Armand incarnait son destin; il lui aurait paru inconcevable de vivre sans lui. (…) Mais curieusement, cette ténacité d’Allégra n’effrayait pas tant Armand; au contraire, elle le rassurait.»
Pourquoi Armand ne quittait-il donc pas sa femme puisqu’il pensait tant aimer sa maîtresse?
«… en effet, pourquoi ne partait-il pas? A-t-il besoin, pour la quitter, de la permission de sa femme? Et soudain, avec une évidence très forte, il comprend que oui, il a besoin de son accord; il sait même pourquoi: s’il partait avec l’accord d’Allegra, il pourrait un jour, si besoin en était, revenir, réintégrer la Villa. La vérité est qu’il veut, de cette manière, garder Allégra; la vérité, presque comique, est qu’il veut garder toutes les deux, l’âge mûr et la jeunesse, le calme et l’agitation, le rêve et la sécurité. »
Malheureusement, tel est le choix que voudraient pouvoir faire tant d’hommes. Ils veulent les deux. Pourtant, cette situation ne fait que des malheureux. Mais ils sont ainsi: égoïstes. Ils veulent les deux tout en sachant que cela est impossible.
«Même Allegra, que l’idée de perdre Armand plongeait dans un désespoir morbide, ne comprenait pas davantage pourquoi il ne la quittait pas. Au cours de ces scènes innombrables où la fatigue les transformait en somnambules, en machines à paroles, Armand avait fini par convaincre sa femme qu’elle n’avait pas su le rendre heureux. Force avait été à Allegra de l’admettre avec une insupportable douleur; elle en demeurait abasourdi, comme lorsqu’on apprend que l’on n’a pas su aimer un enfant qui, un jour, vous le crie à la figure. On a beau s’en étonner, se le reprocher, essayer de se souvenir de ses erreurs, il est déjà trop tard. Elle continuait à pratiquer les rites sur l’autel conjugal, sans la foi mais avec plus de minutie encore qu’autrefois, dans l’espoir insensé que, de la braise qui couvait sous la cendre, surgisse quelque flammèche. Et parce que, dans cette symbiose très mystérieuse qui se forme entre un homme et une femme, les racines communes deviennent plus énormes que les troncs respectifs, de sorte que l’arrachement de l’un risque de déchirer l’autre; parce que, de toute manière, elle n’aurait pu survivre autrement. »
Armand a essayé de rompre avec sa jeune maîtresse à plusieurs reprises. En vain. Dès qu’elle l’appelle ou se manifeste, il court auprès d’elle.
Mais Armand n’est pas heureux. Il est déchiré. Il n’est plus lui-même. Il est double. Il est tricheur. Il est menteur. Il vit en se cachant… Est-ce à cela qu’il aspirait?
Et puis, aucune des deux femmes n’est heureuse. Chacune voulant plus, chacune exigeant d’occuper la meilleure place dans sa tête, dans son cœur. Chacune voulant plus et même tout. Où est le repos d’Armand?
Et sa jeune maîtresse, si elle devenait la seule dans sa vie, s’il vivait avec elle, s’il partageait sa vie, ne se transformerait-elle pas en épouse? «Fallait-il bouleverser sa vie et celles de tous pour se retrouver dans une nouvelle prison, derrière d’autres barreaux et dans d’autres renoncements certainement plus pesants?»
Armand ne sait plus quoi faire ni que penser. Il ne se sent pas bien dans sa peau. Il va rompre. Il ne peut que rompre d’avec sa maîtresse. Comme elle lui a si bien dit, il veut se retrouver lui-même.
La vie et les circonstances se chargeront de les séparer. La jeune maîtresse fera sa vie avec un jeune homme.
Reste Armand.
Armand qui comprend finalement que son salut dépend de sa tranquillité d’esprit, dans son travail, dans sa famille, de cette routine qu’il croyait détester mais qui est quand même salutaire.
Armand ne veut plus de cette vie double, de ces mensonges. Il veut retrouver sa vie d’avant, celle qu’il menait au grand jour. Et surtout, suite à un cauchemar, Armand va comprendre que sa femme, Allégra, fait partie de lui-même. Elle est son port d’attache, qui s’il venait à disparaître, le laisserait dériver à l’aveuglette.
«…il se mit à appeler: Allegra!, curieusement certain qu’elle ne pouvait être loin et qu’elle seule pourrait lui apporter apaisement et sécurité. Allegra avec ses manies, son organisation domestique, ses préjugés, son sacro-saint bridge, était l’image réfléchie de cette cohésion, qu’il avait toujours recherché, patiemment construite, sans se l’avouer, sans l’avouer à personne. (…) Oui, Allegra fait partie de ma coquille; si je devenais infirme, aveugle ou paralytique, mieux vaudrait que je continue à vivre au milieu de cet espace familier dont je connais le volume, le nombre de pas et les moindres aspérités agaçantes et rassurantes; sans Allegra, trop vieux prisonnier libéré, je me heurterais, me blesserais au monde, je serais amnésique et nu.».
Je trouve que l’auteur a su trouver les mots justes pour traduire les pensées d’Armand et décrire l’état des autres personnages.
Très beau livre sur les questionnements que l’on peut avoir à une certaine période de sa vie, lorsque l’on prend soudain conscience que les années ont passées. Crise de la quarantaine pour certains, crise de la cinquantaine pour d’autres, ou crise existentielle tout court.
Finalement, comme le dis aussi bien Voltaire dans «Candide», que Paolo Coelho dans «L’Alchimiste», et d’une façon beaucoup plus accrue ici, plus réfléchie et mieux décrite, on ne trouve son vrai bonheur qu’en cultivant son jardin. Bonheur et sérénité que l’on cherche parfois très loin, et qui pourtant sont juste à coté parfois.
C'est incroyable ce que la méchanceté de certains, les médisances, les racontars, les hazzan klem et jiben klèm peuvent influer sur nos vies et nous créer des problèmes. Problèmes parfois très graves. Tracas, disputes, mésententes, ruptures, divorces...
Mais j'ai un énorme problème: je ne sais pas réagir face à cela. Je ne sais pas rendre les coups. Je ne sais pas les arrêter. Lorsque ces personnes ne sont pas proches, je m'en vais tout simplement. Mais que faire lorsque ces personnes font partie de l'entourage et qu'il faut les fréquenter?
Je l'avoue, je ne sais pas que faire, comment réagir, quoi dire...
On me reproche d'être monolithique. C'est vrai, je le suis quelque part. Je ne sais pas faire l'hypocrite, je ne sais pas mentir, je ne sais pas faire des sourires à ceux que je n'aime pas...
Alors que faire?
Comment me défendre?
Comment arrêter cela?
Je ne sais pas. Je n'y arrive pas. Je n'y arrive plus.
Et avec l'âge, les problèmes s'aggravent. La méchanceté est plus pernicieuse, plus destructrice....
Que faire?
La sourde oreille n'est pas efficace.
La confrontation?
Ce n'est possible qu'avec les gens droits, pas avec les hypocrites et les manipulateurs...
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