Je suis rentrée il y a environ 2 heures, mais j'ai encore des étoiles plein les yeux. De l'espoir mais aussi des craintes.
Les Tunisiens libres, femmes et hommes, se sont déplacés par milliers ce soir pour crier leur soutient à la citoyenneté de la Tunisienne et à l'égalité des tous les Tunisiens, quelque soit leur sexe.
Ils ont rejeté en bloc l'article 28 du projet de constitution, adopté par 12 voix contre 8 en commission mais qui sera soumis à l'assemblée plénière.
Pour en savoir un peu plus sur cet article 28, vous pouvez lire cette note sur facebook.
Avec des amis, nous étions sur l'avenue Habib Bourguiba dès 19h. Nous voulions voir et prendre la "température" de l'avenue.
A notre arrivée, vu que c'était l'heure de la rupture du jeun, il n'y avait pas grand monde, mais par contre les policiers étaient là en force du coté du Théâtre Municipal et plus précisément du coté de la statut d'Ibn Khaldoun. En effet, plusieurs associations avaient fixé le point de départ de la marche à cet endroit-là. Le nombre de policiers était vraiment impressionnant.
Nous avons diné et ensuite, un nouveau petit tour pour voir. Les policiers étaient toujours là bien-sûr. Nous sommes allés à la place Med Ali devant le siège de l'UGTT, mais il n'y avait personne. Retour sur l'avenue Habib Bourguiba. Les passants commençaient à affluer. Les policiers laissaient passer.
Nous n'avons pas vu de manifestants de ce coté là de l'avenue, mais des amis nous avaient dit que les manifestants commençaient à affluer sous la monguèla. Alors direction Monguèla.
En cours de route, nous avons croisé les dirigeants et militants du Hizb Il Jomhouri qui s'étaient donné RDV devant le siège de leur parti. Ils se dirigeaient vers la Place du 14 janvier 2011.
Arrivée à la Monguèla, j'ai trouvé mes amis du Massar parmi les manifestants.
Il y avait déjà du monde, mais les gens arrivaient de plus en plus nombreux.
J'ai eu de la rage contre les flics. il y en avait un nombre impressionnant du coté de la statut Ibn Khaldoun mais je n'en ai vu aucun du coté de la monguèla, or c'est là que cela se passait. Ils auraient du être là pour mettre de l'ordre et s'occuper de la circulation automobile. Il y avait à un moment une grande pagaille. Et leur devoir était d'être là. Ils oublient qu'ils doivent encadrer la manif pas seulement réprimer. Mais bon!
Les slogans tournaient autour de la femme, mais aussi et surtout contre les dirigeants de Nahdha.
Ya Ghannouchi, ya jaben, il mra ettounsia lè touhan.
Il mra ettounsia ma hich Meherzia
Mousawet, mousawet fil 7ou9ou9 wal wajibètt
Echa3b fadd fadd mil trabelsia ejdodd*
J'ai accompagné la marche vers l'avenue Med V. Et plus j'avançais, plus j'étais impressionnée. Et déçue aussi quelque part. Aussi loin que portait mon regard, il y avait du monde. Pourtant, ce n'était pas évident. Depuis la répression du 09 Avril, beaucoup de gens ont peur de manifester. En plus, depuis plusieurs jours, il y a eu un matraquage à la radio pour dire que la manif n'était pas autorisée. Ce n'est que depuis deux ou trois jours que le message avait changé pour dire que seule l'avenue Habib Bourguiba était interdite le soir et que la marche était autorisée sur l'avenue Med V, mais beaucoup de gens pensaient que l'interdiction concernait toute la manif. En plus de ramadan....
Comme d'habitude, je me suis promenée entre les divers manifestants. Je publie ici quelques photos et vidéos, mais vous en trouverez plusieurs autres sur ma page facebook qui vous donneront une idée un peu plus précise sur l’ambiance qui régnait.
On m'a raconté qu'une partie des manifestants s'était plutôt dirigée vers l'avenue Habib Bourguiba. J'ai lu quelque part que les policiers les avaient laissé passer malgré l'interdiction mais qu'il y a eu quelques petites escarmouches. Il parait même d'ailleurs qu'après la marche, ces manifestants ont fait le bonheur des divers commerçants de l'avenue Habib Bourguiba. Comme quoi lorsqu'il n'y a pas répression, le douleb idour!!! :-))
J'ai vu des gens connu, d'autres moins connus. Des artistes, des politiciens, des journalistes, des activistes des droits de l'Homme, quelques élus à l'ANC....
Parmi ces élus, j'ai vu M.Selim Ben Abdessalem élu sur les listes d'Ettakattol mais qui s'est démarqué ces derniers temps par des positions différentes de celles de son parti. Une démission en perspective?
Parmi ces personnalité, j'ai vu M.Fredérique Mittérand, Mme Sophie bessis, M.Mohamed Kamel Nabli, M.Khemais Ksila, M.Iyed Dahmani, M.Nejib Chebbi, M.Issam Chebbi, M.Chokri Belaid, M.Mohamed Baroudi, M.Abdelaziz Kotti, M.Saïd Aïdi, M.Selim Ben Abdessalem...
Vers 22h je crois, j'ai abandonné les manifestants sur l'avenue Med V et je suis arrivée à me frayer un passage vers le palais des Congrès qui était aussi archi-plein. A mon arrivée, Mme Maya Jeribi prononçait un discours.
Je suis admirative de cette femme. Une femme tunisienne comme on les aime, ou du moins comme je les aime.
Ensuite, cela a été au tour de Mme Selma Baccar qui nous a présenté un court métrage qu'elle a réalisé en 1975 mais qui est tout à fait d'actualité.
Ensuite, place à M.Raja Farhat qui nous a époustouflé par un "discours du Président Habib Bourguiba". C'était presque réel. M.Habib Bourguiba était parmi nous.
Mme Sana Ben Achour, Mme Neila Sellini, Med Sghair Awled Ahmad et M.Slahddine Jourchi ont pris la parole l'un après l'autre.
Bien que j'aurais aimé voir des centaines de milliers de personnes, j'étais contente que des Tunisiens se soient mobilisés pour les droits des femmes. Des femmes de tous les âges, mais aussi des hommes. Un grand merci pour ces hommes qui pensent et aiment leurs mères, sœurs, femmes et filles.
Un ami m'a dit avoir entendu dire que le Ministère de l'Intérieur a annoncé que nous étions 30 000 personnes à manifester. C'est possible. il y avait du monde partout, sur l'avenue Habib Bourguiba, sur l'avenue Med V et à l'intérieur du palais des Congrès. Mais en plus de cela, en rentrant, j'ai vu des photos et des vidéos de manifestations organisées dans plusieurs villes Tunisiennes, dont Sfax, Mahdia, Béjà, Chebba, Gabes... Bravo encore à tous ceux qui se sont mobilisés.
Cela fera-t-il reculer nahdha?
Peut-être. Mais peut-être pas. Je suppose qu'elle opérera un repli stratégique déjà amorcé par des déclarations à propos d'égalité entre les citoyens. Mais depuis des mois que Nahdha est au pouvoir nous savons tous qu'elle revient toujours à la charge par des moyens détournés. Il faut donc rester vigilants et lutter. Lutter encore et encore....
La femme Tunisienne est citoyenne à part entière.
Tous les Tunisiens sont citoyens à part entière, sans distinction aucune de sexe, de race, de couleur, de religion, de langue, de régions, d'origine... Tous citoyens et égaux en droits et obligations.
Vive les Tunisiens!!!
*- Ghannouchi le poltron, la femme tunisienne ne peut être humiliée.
- La femme tunisienne n'est pas Meherzia
- Egalité, égalité des droits et des obligations
- Le peuple en a marre des nouveaux trabelsi
Ce qu'il faut aussi, c'est ne pas se sentir victorieux juste parce que cet article aurait été abandonné (comme tu dis ennahdha revient de toutes façons toujours à la charge),mais n'oublions pas que la femme est inférieure à l'homme dans nos lois et dans notre quotidien. N'oublions pas que le premier instrument de domination sont les institution du mariage et de la famille, où dès qu'elle dit "oui" la femme devient se met sous la tutelle d'un homme. Il faut continuer à dénoncer cela, j’appellerais bien à boycotter le mariage mais bon ne rêvons pas trop non plus ^_^
Rédigé par : Lilith | 16/08/2012 à 16:45