Je regardais un DVD de Gad el Maleh et plus précisément le sketch sur le portable. A la fin, le grand père appelle ses enfants. Ils ne sont pas là. Il leur laisse un message leur demandant de le rappeler pendant qu’il est encore là.
On comprend que le vieux voulait dire pendant qu’il est encore en vie. Il faisait un reproche à ses enfants qui ne l’appellent pas aussi souvent qu’il le souhaite.
Ce sketch m’a ramenée 22 ans en arrière. En 1985. J’avais 21 ans. J’étais amoureuse. J’étais étudiante. J’étais insouciante….
A 21 ans, on a l’impression que l’on a toute la vie devant soi pour faire plein de choses…
J’étais étudiante à Paris. J’étais rentrée à Tunis pour les vacances de Pâques. Seulement 2 petites semaines à passer à Tunis. Un petit ami avec qui passer un max de temps. Des amis à voir. Des sorties à rattraper. Des courses à faire….
Et en principe, un grand-père à voir également…
Mais comme je vous l’ai dit, à 21 ans on s’imagine que l’on dispose de tout le temps que l’on veut, que la vie est éternelle, et qu’il y a des priorités bien plus importantes qu’un vieux grand-père….
J’ai passé toutes mes vacances en repoussant la visite au grand père au lendemain. Demain, j’irais le voir. Oh, et puis, tant pis, je m’organiserais demain…
Et 15 jours se sont écoulés, sans visite au grand père.
Le dernier jour, il m’appelle au téléphone. Reproches. Reproches. Je lui promets que la prochaine fois, j’irais le voir en premier. J’avais honte. En plus, mon grand père m’avait fait des reproches, mais gentiment. Ce qui donne encore plus de poids aux reproches, et donne encore plus de remords. La prochaine fois, promis, je te rendrais visite…
Mais il n’y a pas eu de prochaine fois.
Mon grand père est décédé en juin 1985. J’étais en France. Je ne l’ai plus jamais revu.
J’ai toujours regretté cela. J’ai toujours regretté que ses toutes dernières paroles pour moi aient été des reproches. J’ai toujours regretté de ne pas l’avoir revu une dernière fois, avant qu’il ne soit trop tard…
Profitons vite des gens que nous aimons, parce que malheureusement, nous ne sommes pas éternels.
J’ai reçu cette vidéo par mail. Le hasard fait bien les choses parfois, parce que mon mari devait partir en voyage et que j’ai reçu une proposition pour un voyage en Iran.
Grand dilemme: Peut-on partir en voyage et laisser son conjoint seul sans crainte???
Répondre à cette question est difficile.
Pourrais-je aller en Iran et le laisser seul?
????
Hier matin mon mari est parti.
A-t-il eu raison de me laisser seule???
Je me pose la question.
En fin de compte, il n’aurait pas du. On ne sait jamais ce que je pourrais faire.
Tout d’abord, je vais faire tout ce qu’il n’aime pas….
Nous dînerons devant la TV en regardant Sboui et non pas dans la salle à manger.
Je ne m’occuperais pas de la cuisine. Je ne me maquillerais pas. Je ferais la grasse matinée. Je me promènerais pieds nus et en chemise de nuit dans la maison…
Et tous les soirs je vais m’éclater…
Je vais faire le tour de toutes les soirées ramadanesques… à la TV.
Je vais me gaver de films pour adultes égyptiens. Mon mari déteste ce genre de films et j’ai rarement l’occasion d’en voir jusqu’à saturation. Ce n’est pas qu’il ne me laisse pas en voir, mais il m’énerve à chaque fois que j’en vois un. Il se met à coté de moi, et il commence: «je ne comprends pas qu’une femme instruite comme toi puisse regarder ce genre de débilités», «tu as vu la qualité de l’image? Quelle horreur! Et le son!!!!», «qu’est-ce qu’elle a dit?», «pourquoi ils passent leur temps à hurler?»…. (Il ne fait une exception que pour certains films, tels ceux de Youssef Chahine ou Yousri Nasrallah).
Qui a dit que les femmes étaient kharnènas???? Je dirais que dans ce cas, ce sont plutôt les hommes. Il est tellement kharnène que je préfère laisser tomber ces films en sa présence.
En plus, j’ai acheté des DVD, des comédies sentimentales, des histoires d’amour larmoyantes…. Je vais pleurer tout mon saoul sans voir ses sourires narquois et moqueurs!
Et je vais avoir plus de temps pour lire…
Mais surtout, surtout, surtout, je vais me mettre à la diète.
Ce ramadan a eu des conséquences désastreuses pour moi: bouza, brick hlib, gâteaux, hlou… et même cheese cake.
5 jours, et surtout 5 soirées toute seule vont me permettre d’éviter toutes tentations….
Waooooooooooow, malla jaow wa malla chikha!!!!
P.S.: Malgré tous ces bonheurs, le vrai BONHEUR est lorsqu’il est à mes cotés. Vivement vendredi pour qu’il rentre!
Vendredi après-midi, je rentrais avec les enfants, je me suis arrêtée devant la boulangerie, j’étais très pressée parce que mon fils avait un cours d’arabe, et nous étions déjà en retard.
J’ai garé ma voiture.
J’ai acheté mon pain, j’ai voulu partir, mais je n’ai pas pu, j’étais coincée par d’autre véhicules. Comme la voie semblait libre devant moi, j’ai avancé pour me dégager des autres voitures.
Problème: apparemment, il y avait des restes d’un chantier. Un bout de fer dépassait. Lorsque j’ai avancé, j’ai du toucher ce bout de fer qui était planté dans des «morceaux» de béton. Bref, comme la pluie avait rendu le terrain boueux, plusieurs blocs de béton se sont déterrés, et ont bloqué ma voiture. Les roues tournaient en l’air. J’ai essayé de bouger les blocs de béton, mais cela était impossible. Je ne savais que faire.
J’ai appelé mon mari à mon secours. Et j’étais là à attendre.
Quelques hommes se sont arrêtés. Mais lorsqu’ils ont vu le problème, ils sont partis. Tout simplement.
Lorsque est arrivé un homme d’environ 35 ans.
Comme les autres, il a bien regardé. Il a évalué le problème. Et il est resté pour tenter de m’aider. En fait, il a pris les choses en main. Au sens propre comme au sens figuré.
Il s’est démené. Il a poussé. Arraché. Déplacé… Il avait les mains et les pieds dans la boue.
Après bien des tentatives, il est arrivé à dégager ma voiture.
Cet homme est venu à mon secours. Cela lui a pris du temps. Il a du faire des efforts, peiner… Ses chaussures étaient pleines de boue. Il s’est sali les mains…
Il a été le seul à le faire.
Merci Monsieur. Vous êtes un vrai gentleman.
Que vous soyez tunisien est une fierté pour moi.
Le lendemain, je suis retournée à cet endroit pour prendre ces photos:
Question difficile. Je n’y avais pas particulièrement pensé jusqu’à avant-hier.
A mon avis, à chaque âge correspondent des critères différents.
Il est certain qu’à 18/30 ans, on se marie généralement par amour. Du moins, on espère faire un mariage d’amour. On espère rencontrer l’homme ou la femme de sa vie et finir ses jours avec lui/elle. Je pense que c’est le souhait de toutes les jeunes filles, et peut-être celui de la majorité des jeunes hommes (?).
Je crois aussi qu’à cet âge, on ne pense pas à tellement plus que cela.
Du moins, moi, lorsque j’avais cet âge là, je ne pensais qu’à une seule chose: épouser le grand amour de ma vie.
J’avais seulement deux conditions précises: je voulais un homme plus grand que moi (donc minimum 1m80) et surtout un homme qui aime la lecture.
Avec l’âge et l’expérience, j’ai rajouté une troisième condition: que sa mère soit gentille et intelligente.
A part cela, j’attendais de le trouver, et je savais que dès que je le verrais, je me dirais c’est lui…
Tout le reste était pour moi insignifiant: le fils de qui? Quel est son métier? Quel est son physique?….
A 35/45 ans (et plus), a-t-on encore ces mêmes critères de choix?
Peut-on encore se permettre de dire: je ne me marierais qu’avec l’homme ou la femme dont je tomberais amoureux???
Je ne pense pas. L’horloge biologique a commencé à sonner l’alarme. Surtout pour les femmes. A 40 ans, l’espoir d’avoir des enfants s’amenuise. Il commence à y avoir urgence pour celles qui rêvent de fonder une famille.
Alors quels sont les critères?????
Comment faire son choix???
Peut-on être aussi exigeant qu’avant???
Les exigences sont-elles les mêmes???
A quoi aspire-t-on lorsque l’on a 35/45 ans???
Et même à 30 ans, est-il raisonnable de penser encore au grand Amour???
Si on a le choix, quel sera justement le choix???
Si un homme ou une femme devait choisir, quel choix ferait-il/elle? Celui du cœur ou celui de la raison?
Si une personne hésitait entre un conjoint tranquille, sage…, mais pour lequel le cœur ne battrait pas particulièrement, un conjoint qui assurerait une sécurité affective, mais avec lequel la vie serait sans surprises, et un conjoint beaucoup moins sûr, plus fantasque, plus sympathique, plus attirant, mais avec lequel la vie un grand point d’interrogation et un vrai coup de poker, lequel choisirait-elle????
Pourquoi je me pose et vous pose toutes ces questions???
Pour une raison toute simple.
Cet été, j’ai proposé à une amie de 30 ans de lui présenter un ami de 40 ans. Je sais que cette fille ne pense qu’au mariage depuis quelques années. Elle en parle tout le temps. Je sais qu’un des critères important pour elle, est l’aisance financière. Elle est aisée et ne veut en aucun cas perdre son standing. Elle était très intéressée, et était d’accord pour le rencontrer… jusqu’au moment où elle a appris qu’il est divorcé avec enfants. Ensuite, elle l’a quand même vu et m’a reproché d’avoir pensé à elle, parce qu’en plus, elle a trouvé qu’il n’était pas beau garçon (ce qui est faux d’ailleurs, il est tout à fait normal, il est grand et mince, et présente très bien).
Cette jeune femme ne parle plus de faire un grand mariage d’amour, mais quand même, ses exigences restent très importantes: un homme RICHE, mais aussi beau, gentil et célibataire.
Personnellement, je pense qu’un homme répondant à tous ces critères ne peut rester libre très longtemps, et est donc difficile à trouver….
Une autre amie se trouve actuellement en plein désarroi. Elle est divorcée, proche de la quarantaine, et a deux prétendants:
- un homme qu’elle connaît depuis des années, la quarantaine, célibataire, sérieux, trop sérieux même. Objectivement, il pourrait faire un bon mari et un bon père. Il lui manque quand même un chose: il n’a aucun coté fantasque. La vie avec lui «risquerait» d’être un long fleuve tranquille. Sécurité, sécurité… mais peut-être même jusqu’à l’ennui. Mais disons qu’il serait le choix de la raison, la valeur sûre.
- un homme qu’elle ne connaît que depuis quelques mois, mais qui l’attire vraiment. Objectivement, il n’est pas mal du tout. En plus, «sahib jaow», avec lui, elle ne s’ennuierait pas. Mais… affectivement, il est relativement instable. Aujourd’hui, il est amoureux d’elle. Qu’en sera-t-il demain?
Le choix de la raison ou le choix du cœur???
L’âge entre en compte ici. Une femme de 35/40 ans ne peut plus vraiment se permettre de se tromper, elle n’a plus de temps à perdre.
C’est d’ailleurs une autre inégalité entre les hommes et les femmes.
Une double inégalité en fait. Une inégalité «naturelle»: les hommes peuvent avoir des enfants jusqu’à un âge très avancé, et pas les femmes.
Et une inégalité sociale. En Tunisie, un homme divorcé et d’un certain âge peut se remarier très rapidement et même plusieurs fois. Alors qu’une femme divorcée et d’un certain âge aura bien du mal à se remarier.
Ce sont juste des idées pêle-mêle, que je vous livre telles quelles. Et vous, qu’en pensez-vous?
Il parait qu'avant hier, un avion Tunis Air, venant de Paris a eu un petit problème technique: à l'arrivée, le train d'atterissage n'a pas voulu s'ouvrir.
L'avion a du tourner en rond pendant 45mn au dessus de l'aéroport.
Au sol, tout a été préparé pour un atterissage d'urgence: pompiers, protection civile, ambulances...
Mais il parait qu'aucun mot de tout cela n'a été dit aux passagers. Aucune préparation, ni gilets de sauvetages, ni rien... Pas un mot, sauf peut-être des vas et viens trop importants du personnel à bord.
Est-ce vrai?
Panne? Mauvais entretien? Matériel vétuste?
On ne nous dit tellement rien dans ce pays que l'on ne peut jamais savoir ce qu'il s'y passe réellement, si ce sont des rumeurs ou la réalité...
Que des suppositions et des "il parait...", "j'ai entendu dire...", "on m'a raconté..."...
Comme certains d'entre vous le savent, hier, c'était l'anniversaire d'Emma.
Nous étions invités chez elle pour le fêter en sa compagnie.
Et sincèrement, voila ce que je me suis dite hier: combien les hommes peuvent être aveugles, c'est incroyable!
Voici une très jolie jeune femme, très sympathique, spontanée, instruite, bien élevée... et encore célibataire???
Incroyable!!!
En plus, elle sait faire la cuisine: c'est elle qui a fait son gâteau, et vous pouvez me croire, il était délicieux. Sa soeur a fait la Bouza, délicieuse aussi, donc il y a de fortes chances qu'Emma la fasse aussi bien...
Et sa mère!
Pendant toute la soirée, je pensais que sa mère était sa soeur!!!!
Sa mère parait très très jeune... alors imaginez un peu si Emma a hérité cela de sa mère!
Bref, je crois que les hommes ont besoin d'aller illico subito consulter un ophtalmo et un psy. Un ophtalmo parce qu'ils sont aveugles, et un psy parce qu'ils ne savent pas réflèchir et prendre les décisions qui s'imposent...
Joyeux anniversaire Emma, et... bienvenue dans le club des vieux!!!!!
(…) Les paroles que nous citons ont été prononcées par l’ensemble des prédicateurs, quel que soit le rite auquel ils appartiennent. En voici la teneur:
«Peuple d’Égypte, voici ce que nous dit le Prophète - sur lui le Salut et la Bénédiction: Le sage n’aura pas honte d’avouer son ignorance si on l’interroge sur ce qu’il ne connaît point. Et c’est cela même que nous disons à ceux qui ont déclaré licite l’usage des lanternes qu’ils ont fait placer devant les maisons et les boutiques. Pour légitimer une telle hérésie, on a invoqué la «connaissance des usages du passé et de l’histoire». Tant que nous y sommes, pourquoi ne pas aller jusqu’à prétendre connaître l’avenir?… Nous le disons net. Ces gens-là ne sont pour nous que des mécréants. Ils ont beau nous déclarer qu’il y a des précédents, que, chez plusieurs peuples, dans de nombreuses nations, les autorités ont doté leurs villes de lanternes pour éclairer les rues… Mais - avec tout cela - ont-ils fait état d’un exemple précis? Notre Prophète avait-il besoin de lanterne pour éclairer ses pas lors des deux voyages qui le menèrent, l’un l’été, l’autre l’hiver, en Syrie et au Yémen? A-t-il eu besoin, pour éclairer son chemin, de lanternes fabriquées de main d’homme? Nous le disons tout haut, sans détour, et nous sommes prêts à risquer nos têtes; nous le disons à tous ces ignorants qui ont bien du mal à cacher leur ignorance, nous le leur disons sans crainte - car nous n’avons rien à craindre - habitants de notre pays Égypte, sachez que cette coutume hérétique est sans précédent. Jamais l’usage des lanternes n’a existé. Votre Prophète vous a ordonné de détourner les yeux des parties du corps humain dont la vue offensait la pudeur. Or, les lanternes découvrent ces parties et si le Créateur a instauré la nuit et le jour, la nuit sombre et obscure, le jour resplendissant, c’est qu’il a conçu la nuit comme un voile et un manteau impénétrable. Allons-nous arracher ce voile, allons-nous dévoiler ce que Dieu nous a ordonné de tenir caché? Allons-nous pousser notre insolence sacrilège jusqu’à abolir l’obscurité naturelle de la nuit, et la chasser pour toujours de notre ville? Ce serait là le comble de l’impiété et nous ne saurions le permettre. Ce serait là enfreindre les limites fixées par Dieu aux prérogatives de Sa créature, et nous ne saurions y souscrire. N’était la pureté d’intention du Zayni que personne ne contestera, nous dirions que ces mesures répondent à des desseins inavouables. Mais nous reconnaissons que depuis qu’il a pris la responsabilité de la Censure, nous n’avons eu qu’à nous louer des initiatives qu’il a prises, et cette affaire des lanternes n’entamera pas la confiance que nous avons placé en lui, ne nous inspirera pas le moindre soupçon à son égard.
Habitants de notre ville, adressez-vous au Zayni lui-même, allez le trouver chez lui, individuellement ou en groupe, et demandez-lui qu’on nous débarrasse de ces lanternes qui violent ce qui doit rester secret, qui encouragent nos femmes à sortir après la prière du soir. Allez donc le voir; sachez vous montrer humbles, mais fermes; sachez supplier, mais sachez exiger. Puisse-t-il ne pas vous circonvenir par des paroles habiles et séduisantes. Ne vous laissez pas détourner de votre dessein. Ces lanternes sont un signe de la fin du monde qui n’obéit plus au dessein de son Créateur - que son nom soit exalté! Exigez les pires châtiments contre celui qui a osé inspirer au Zayni une idée si funeste, demandez qu’il soit brûlé à petit feu, lapidé, scié en deux! Ces gens-là sont des ignorants, qui prétendent savoir… Maudit soit le jour qui a vu l’apparition de ces funestes lanternes! Grand Dieu, épargne-nous ce malheur, délivre-nous des maudites lanternes, puisses-tu raccourcir nos vies, pour que nous ne connaissions point ces jours maudits…»
(C’est alors que, dans les mosquées, les fidèles ont éclaté en pleurs, et que certains s’exclamèrent: «Ô Dieu, puisses-tu détruire les maudites lanternes!… Ô Dieu, fasse qu’elles soient mises en pièces et détruites).
Déclaration du Grand Cadi d’Égypte.Texte de la fetwa.
Nous affirmons que l’usage hérétique des lanternes privera le peuple d’Égypte de la protection toute particulière que Dieu, dans Son ineffable sollicitude, lui avait accordée.
Déclaration du cadi du rite hanéfite, qui soutient l’opinion inverse.
La lumière des lanternes chassera les démons, permettra aux étrangers d’y voir clair la nuit et de reconnaître leur chemin; elle empêchera les mamelouks à la solde des émirs ainsi que les bandits de se livrer aux agressions nocturnes dont-ils étaient coutumiers au détriment des pauvres innocents…
Déclaration du Grand Cadi Égypte
L’un de nos grands ulémas s’est rendu coupable d’infraction à la Loi; sa décision est contraire aux principes sacrés qui fondent notre Loi, de même qu’elle contredit la jurisprudence en ce qu’elle justifie l’usage des lanternes.
Aujourd’hui, des émirs de haut rang sont montés à la Citadelle pour être reçus par le sultan. Voici les propos tenus.
L’émir Khaïrbek
Majesté, la décision d’installer ces lanternes dans tous les quartiers de notre ville n’a eu pour autre effet que d’inciter les femmes du commun à sortir de chez elles après la prière du soir - quelle hardiesse! -, à se promener sur la voie publique ou à veiller devant les portes de leur maison ou dans les bazars. Voilà qui enfreint gravement les usages, voilà qui va à l’encontre de la modestie et de la pudeur auxquelles les personnes du sexe doivent être soumises.
L’émir Qoûsoûn
Dorénavant, les jeunes gens ne rentrent que fort tard dans leurs foyers. Voilà qu’ils restent des heures durant, sur la voie publique à réciter des poésies, à chanter; ils s’enhardissent même parfois à narguer nos mamelouks, leur jettent des pierres et leur adressent des paroles injurieuses.
(…)
L’émir Toushtamir
Le Zayni envoie ses hommes, au début de chaque nuit. Ils montent sur leurs échelles de bois, allument les lanternes et les tiennent en état, du moins c’est-ce qu’ils prétendent; en fait, Majesté, et vous tous, nobles émirs, ils ne font rien d’autre que d’épier les braves gens… et nous aussi, par la même occasion; c’est ainsi que l’intimité des foyers est violée par ces tristes individus.
Et tous de s’écrier: «voilà qui est juste! C’Est-ce que nous pensons tous!»
Déclaration du Grand Cadi Abd el-Barr ibn Shihna
Les propos tenus par le cadi hanéfite constituent un précédent extrêmement grave et tout à fait nouveau; il a osé nous contredire; nous considérons qu’il s’agit là d’un incident d’une extrême gravité.
El-Azhar, portique des étudiants de Haute Égypte
Certains étudiants ont approuvé la décision du Grand Cadi. Ils ont fait valoir qu’un homme de son importance ne pouvait pas condescendre à s’occuper de cette question de lanternes que si l’affaire était de taille, contrairement à ce qu’il apparaissait à d’autres.
(…)
Un étudiant nubien posa la question de savoir si un Grand Cadi pouvait jamais se tromper. Mansour, s’adressant à Saïd, lui dit qu’il n’était pas d’accord avec lui:
- Qu’avait-on besoin d’adopter des usages si extravagants et si peu conformes à la tradition, n’y avait-il pas d’autres affaires plus importantes? Le Zayni ferait mieux de s’en occuper. Et puis franchement Saïd, cette innovation ne me dit rien qui vaille.
(…)
Une phrase qu’on entendit plus d’une fois dans les rues et les mosquées: «Maudites soient ces funestes lanternes. Puisse Dieu nous en débarrasser! Maudites soient ces funestes lanternes!».
J’ai commencé depuis quelques jours la lecture de «Zayni Barakat» de Gamal Ghitany.
J’ai envie de vous copier un passage qui m’a fait sourire.
Je vous mets tout d’abord dans l’ambiance pour que vous compreniez de quoi il s’agit.
L’histoire se passe au Caire, pendant le mois de Shawâl de l’an 912 de l’hégire.
Le Sultan vient de nommer un homme totalement inconnu au poste de «Grand Censeur». D’après ce que j’ai compris, cela équivaudrait un peu au poste de Premier Ministre. Ce Zayni va prendre plusieurs mesures qui le rendront très populaire. Ces mesures sont dans l’ensemble justes et équitables.
Un jour, il prendre une mesure qui va «diviser» l’opinion.
«A partir de ce jour, et à l’avenir, des lampes à huile d’une taille conforme aux directives devront être suspendues aux murs pour éclairer les rues de la ville.
(…) Ces lampes devront être suspendues, devant la porte de chaque quartier, devant chaque maison, chaque palais, ainsi que devant les caravansérails.
(…) Ainsi notre bonne ville du Caire pourra dormir en paix.
(…) Bonnes gens de la ville du Caire,
Sachez que la pose de ces lanternes ne vous coûtera pas un dirham. (…)»
Ces lanternes furent installées, et le système mis en place a bien fonctionné.
Un rapport adressé au préfet des Espions de la ville du Caire au sujet des rumeurs recueillies parmi le peuple le jour même de la proclamation de l’avis, dit:
«(…) J’ai été témoin de rassemblements importants: tout le quartier de Bâtiniyeh - hommes et femmes - était dans la rue. Ce n’étaient que you-yous et hurlements, mains brandies et agitées frénétiquement, bouches grandes ouvertes criant à tue-tête. Je dois dire que les rumeurs dont j’ai pu être témoin sont extrêmement diverses.
Premier point: Après la diffusion … avis publiés…, la foule n’en finissait pas d’appeler la bénédiction de Dieu sur celui-ci; les commentaires les plus élogieux étaient sur toutes les lèvres; les femmes, surtout, étaient enthousiastes. En pleine effervescence, «Longue vie au Zayni!», «Longue vie au Zayni!» les entendait-on scander; elles se plaisaient à répéter que le Zayni connaissait bien les peines que les gens subissaient dans leur âme et dans leur corps…..
(…) «Le Zayni est à l’affût de la moindre injustice; affirmait cet homme, et, en vérité, c’est Dieu lui-même qui l’a envoyé parmi nous pour venir en aide aux miséreux»….
Deuxième point: … J’ai entendu là un autre son de cloche, puisque le sieur Foutouh el-Iskandarani exprimait ses doutes et même sa suspicion à l’endroit des avis publics émanant du Zayni… selon lui, cette situation ne pouvait durer éternellement, que le sultan n’écouterait pas toujours avec la même complaisance ce qu’on lui disait, à moins qu’il n’ait intérêt à cela. L’individu en question a tout fait pour essayer de convaincre l’assistance, avec force gestes et explications….Dans un autre café, j’ai entendu un certain Abou Ghazala… faire la remarque suivante: «voilà maintenant que ceux qui nous gouvernent voudraient faire preuve de justice… Elle est bien bonne!».
Troisième point: (…) si le Zayni prétend introduire cette nouvelle pratique, ce ne serait qu’un prétexte pour faire parler de lui… Sur cette affaire des lanternes, les commentaires vont bon train. Certains font valoir que c’est là une mesure qui permettra d’empêcher les mamelouks et les bandits de se livrer aux incursions nocturnes dont ils sont coutumiers; à cela il a été répondu que la lumière à elle seule n’empêcherait pas les rôdeurs, les mamelouks ou les bandits d’attaquer; si ces derniers étaient déterminés à le faire; ils n’auraient alors qu’à détruire les lanternes….
Quatrième point: (…) d’après un étudiant d’el-Azhar… la multiplicité des avis se succédant sans trêve n’aurait pour autre but que de détourner l’attention du peuple de l’essentiel…
Cinquième point: Du haut de leurs chaires, les prédicateurs ont parlé de l’affaire des lanternes et ce, en des termes très critiques. Quant aux chansonniers, dans les cafés, ils ont tourné l’innovation en ridicule; voici l’une des pièces composées sur ce thème:
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