Il y a environ 3 à 4 jours, j'ai découvert cet imam: Sayed Ali El-Amine. J'ai écouté quelques unes de ses interventions, et j'ai été très agréablement surprise. Cela me change des pseudo-imams intolérants, ignorants et extrémistes qui dénaturent complètement l'islam.
Je ne connais ni le passé ni le parcours de cet homme, mais d'après ce que j'ai lu, je pense qu'il est très tolérant et très pragmatique. Il est humaniste. Il est rationnel. Et surtout, il s'agit d'un Imam laïque. Je ne pensais pas que cela pouvait exister, mais cela existe.
J'ai lu qu'il disait souvent: "علاقات المذاهب والأديان لا يجوز أن تكون على حساب الأوطان"
Personnellement, je comprends que cet imam a bien assimilé ce que voulait dire laïcité.
Il a compris qu'elle n'était pas contre les religions en général et/ou contre l'islam en particulier.
Au contraire, la laïcité permet à tout un chacun de croire et de pratiquer sa religion en toute liberté, comme il l'entend. En toute liberté, c'est-à-dire que chacun fera strictement ce qu'il voudra et s'habillera comme il le voudra. La laïcité protège tous les citoyens de tous abus. Et elle permet une cohésion et une unité entre tous les citoyens quelques soient leurs pratiques religieuses.
Au lieu de se disputer, de se chamailler et de se surveiller, les citoyens s'uniront pour le bien de leur pays.
C'est d'ailleurs ce que nous explique cet Imam dans cette allocution adressée aux Tunisiens:
الرسالة التي وجهها العلامة المجتهد السيد علي الأمين دام حفظه الى تونس الخضراء - 27-01-2011:
إلى تونس الخضراء نتقدّم من الشعّب التونسي المجاهد بأسمى آيات التّهاني على الإنجاز العظيم الّذي حقّقوه بدماء الشّهداء وتضحيات المجاهدين ونسأل الله تعالى الرّحمة والمغفرة للشّهداء، وللشّعب التونسي التوفيق والنّجاح في عمليّة البناء الجديدة لنظام يصنع لهم الحياة الحرّة الكريمة. وهذه المرحلة هي الأصعب في تحقيق الآمال والطّموحات وهذا يذكّرنا بالحديث المرويّ عن رسول الله عليه أفضل الصّلاة و السّلام عندما قال لسريّة من المؤمنين عادوا من الحرب و الجهاد : لقد انتهيتم من الجهاد الأصغر وبقي عليكم الجهاد الأكبر فتعجّبوا من قوله معتقدين أن الحرب لا يوجد بعدها جهاد أكبر منها! ويشير قول النّبيّ عليه الصّلاة والسّلام إلى أنّ مرحلة بناء المجتمع والدّولة على القيم والمبادئ الّتي ناضلتم من أجلها وهي قيم الحقّ ومكارم الأخلاق ومبادئ العدالة والإصلاح تحتاج إلى مزيد الوعي والتّعاون والتّضامن والإستمرار في بذل الجهود المخلصة لتحقيق الإصلاح في النّظام، والصّلح بين الأنام، بسنّ التشريعات الّتي تحقّق الحريّة والتّعدّدية والعدالة الإجتماعيّة، وهذا هو الجهاد الأكبر الّذي يحفظ الإنجازات، وينمّي القدرات، ويحقّق الطموحات، ويزيل الظّلامات، ويرسّخ الوحدة الوطنية بين الجميع بقيام الدّولة المدنيّة دولة القانون والمؤسسات المنبثقة عن الإرادة الشعبيّة والجهاد في سبيل الشعب من أعظم الجهاد فقد ورد في الحديث ( الخلق عيال الله وأحبّهم إليه أنفعهم لعياله). والسلام عليكم ورحمة الله و بركاته.
Il est devenu à la mode de prendre l'exemple de l'expérience turque pour dire qu'il est possible de concilier démocratie et parti politique islamique.
Est-ce vrai?
Je ne le crois pas. Même en Turquie où la la séparation de l'Etat et de la religion est garantie par la constitution et par l'armée, depuis que le parti islamique est au pouvoir est entrain de grignoter les libertés individuelles des turques. Les manifestations récentes le prouvent.
En apparence, la cohabitation a parfaitement réussie, mais insidieusement, l'AKP est entrain de s'immiscer dans la vie quotidienne des gens et de restreindre leurs libertés individuelles.
Après l'accord de sa rédactrice, je me permet de vous recopier cette réflexion que j'ai appréciée et que je partage.
Le nouveau discours que tient Rached Ghannouchi, depuis le 14 janvier 2011, celui que répandent aujourd’hui les médias sans en souligner les surprenantes contradictions, est d’autant plus dangereux qu’il se présente comme modéré. En homme politique averti, le chef du mouvement Ennahdha sait reculer pour mieux avancer. Ne doit-il pas d’abord et avant tout effacer le mauvais souvenir que lui-même et les siens ont gravé dans la mémoire de bon nombre de Tunisiens? Le chef du mouvement islamiste qui n’a pas hésité, dans les années quatre-vingts, à user de la force pour imposer sa lecture de l’islam, qui a enseigné le mépris des femmes, qui a haussé des illuminés abreuvés de haine et de rejet de l’autre sur les «minbars» des mosquées, qui a jeté l’anathème sur tout être libre, sur toute pensée, qui a profité du régime dictatorial et du chômage qui frappait les jeunes pour substituer à l’espoir de bien vivre l’espoir de gagner l’éternité, qui a diabolisé les francophones et les laïques en les faisant passer pour «des suppôts de l’étranger», ce chef islamiste si radical peut-il se transformer subitement en démocrate?
Rached Ghannouchi n’est pas sans savoir qu’il doit renouveler son discours et se présenter comme un simple citoyen, sans ambition, patriote et démocrate. Pour gagner la confiance des musulmans modernistes, il doit emprunter aujourd’hui le langage apaisant des démocrates. Cette leçon là, la Tunisie entière s’est chargée de la lui apprendre en ce mois de janvier 2011. Mais peut-on devenir démocrate quand, dans le passé, on a fait usage de la terreur pour s’imposer à ses concitoyens? De même qu’il a été impossible de croire en la miraculeuse transfiguration de Ben Ali, le 13 janvier 2011, il est impossible de croire aux promesses du chef du mouvement Ennahdha. Le comportement agressif, grossier et incivil de prétendus défenseurs de l’islam à l’égard des femmes, tant au cours de la manifestation organisée par l’ATFD, l’AFTURD et le collectif Maghreb-Égalité (samedi 29 janvier 2011) qu’à l’aéroport de Tunis Carthage, le jour même de son retour de Londres, a montré l’incapacité de ce type de mouvance à admettre la différence et a, par conséquent, ébranlé le crédit que l’on pouvait lui accorder.
Si le mouvement Ennahdha juge qu’il est victime d’un jugement prompt et injuste, s’il opte, comme l’a dit et répété son chef, pour la démocratie, qu’il donne les preuves concrètes de sa bonne foi et de son engagement en apprenant à ses membres le civisme, la retenue, le respect de l’autre et de sa liberté.
Les règles de la démocratie nous imposent de surmonter nos craintes et de composer avec toutes les mouvances politiques. Soumettons-nous donc à cette convention mais n’oublions pas que les déviations sont toujours possibles et les retournements fréquents. Aussi faut-il unifier les rangs des défenseurs des libertés, en les organisant en forces de propositions alternatives face aux diktats rétrogrades.
Je vais essayer de vous raconter le plus objectivement possible ce que j'ai vu hier, lors de la marche des femmes pour le citoyenneté et l'égalité à l'avenue Habib Bourguiba à Tunis.
Je dis bien "essayer", parce qu'il s'est passé tellement de choses que je ne pourrais vous raconter que ce que MOI, j'ai vu ou entendu. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé ailleurs, surtout derrière moi, ni ce qu'il s'est passé après mon départ.
En plus, la théorie du complot est tellement présente partout...
J'avais RDV à 12h30 à l'Hotel Africa pour emmener une personne avec moi au débat "Etat, religion et société ... et moi dans tout ça?" qui devait avoir lieu à la salle Al Halmra à 13h.
J'étais arrivée un peu tard car il y avait une circulation monstre.
L'avenue Habib Bourguiba grouillait de monde. Il y avait une manifestation, mais je n'ai aucune idée de son objet ni qui l'organisait. J'avais juste pensé que si elle durait, elle risquait d'embeter la marche des femmes à 15h.
Nous sommes donc allés au débat.
Vers 15h, j'ai reçu un coup de fil d'une personne qui m'attendait à la place de l'Indépendence (lieu prévut pour le démarrage de la marche). Cette personne me disait qu'il régnait à l'avenue Habib Bourguiba une pagaille monstre, que la police était entrain de disperser la foule, y compris avec des bombes lacrymogènes. Je n'en sais pas plus. Qui? Comment? Pourquoi? Je ne sais pas.
Une femme qui avait l'air de faire partie des organisatrices, avait dit que la police avait essayé d'évacuer des personnes "indésirables ou louches" pour faire de la place aux femmes. Je ne sais pas quel crédit apporter à ce témoignage.
Lorsque je suis moi-même arrivée sur place, il n'y avait plus rien de tout cela, bien que plusieurs personnes racontaient la même chose.
Je disais qu'à mon arrivée, c'était relativement calme. A part quelques femmes et hommes, il n'y avait pas grand monde au lieu du RDV. J'avoue avoir été un peu déçue croyant que les femmes ne s'étaient pas mobilisées.
J'ai ensuite vu Zeineb Farhat, une des organisatrices de la marche. Je suis allée lui demander où étaient les manifestantes, elle m'a juste répondu qu'elles arrivaient de la place d'Afrique.
En effet, quelques minutes plus tard, elles sont arrivées. Elles portaient des pancartes et criaient des slogans pour demander la liberté et l'égalité. Elles étaient accompagnées de plusieurs hommes qui soutenaient la cause des femmes.
(Cliquez sur les photos pour les agrandir)
Nous nous sommes joints à eux. Nous nous dirigions vers l'avenue de France lorsque nous avions été envahies par des voyous.
Ils se sont melés à nous et ont commencé à crier des slogans de la "révolution", genre: liberté démocratie, RCD dégage. Nous avons essayé de leur faire comprendre que nous n'étions pas là pour parler du gouvernement. Impossible de bouger, ils étaient là et bloquaient la route.
Nous nous sommes donc arrêtés au niveau du Ministère de la femme (à coté de la cathédrale). Nous brandissions nos pancartes et crions nos slogans.
Surtout les autres criaient, moi j'étais encore calme (ou timide).
A un moment, je remarque un mouvement de panique. J'aperçois un type, barbu, portant un 9mis, entrain de hurler alors qu'il était sur les épaules d'un autre homme. Puis il y a eu une bousculade. Le type est descendu (ou tombé) des épaules de son ami. Je l'ai vu cogner. Ils étaient plusieurs à hurler et cogner. Il me semble que certains autres hommes essayaient de faire barrage à ce type en fureur.
Le temps que je prenne mon appareil photo, il était à nouveau sur des épaules, entrain de hurler.
Un cercle s'est formé autour de lui, en hurlant DEGAGE.
Vous pouvez me croire, j'ai hurlé moi-aussi. J'ai hurlé de toutes mes forces. J'étais tout à fait d'accord avec le DEGAGE. Dégage sale type.
Ensuite, nous l'avons ignoré et nous sommes détournés de lui. La marche a repris dans l'autre sens, c'est à dire direction l'Africa, puisque le passage du coté de l'Avenue de France était bloqué par les voyous.
J'étais aux premières lignes. J'étais tellement en colère contre ce type et ses compagnons que j'ai vraiment crié. Tous les slogans.
- Laïcité.
- Egalité.
- Liberté.
- Démocratie.
- Non à l'obscurantisme
Parfois en arabe, parfois en français. Je suivais le rythme des autres.
Il y avait des badauds partout. Certains étaient juste des spectateurs inoffensifs, d'autres étaient étonnés face à ces femmes qui criaient, d'autres encore les raillaient, et d'autres aussi les insultaient en leur criant des propos machistes, genre," les femmes à la cuisine".
Nous avions quand même continué à avancer.
A peu près au niveau du Rossini Palace, une groupe d'homme est venu à notre rencontre. A leur tête, deux hommes (habillés en civil, c'est à dire normalement, pas en 9amis), dont l'un était barbu (c'est peut-être juste un hasard!) et s'en sont pris à nous qui étions aux premiers rangs. Ils criaient, insultaient, et fonçaient vers nous en hurlant et se sont attaqués aux manifestants. Certains hommes qui nous accompagnaient leur ont fait barrage.
Tout d'un coup, juste à coté de moi, j'ai entendu hurler. La personne qui se trouvait à coté de moi nous a dit avoir vu une femme se faire gifler par un type qui lui a demandé de rentrer chez elle.
Notre marche ne pouvait plus avancer à cause de la dispute avec les deux types. D'autres types se sont mis à nous insulter.
Un ami s'est fait insulter par un type qui lui hurlait que nous étions des koffars, que la place des femmes est à la maison. Comme je suis polie, je ne vous dirais pas ce qu'il lui avait dit d'autre. Mais ces propos, à mon avis prouvent surtout que ces gens-là sont des frustrés sexuellement et se cachent derrière l'islam pour ne pas dévoiler leurs complexes.
Quant à moi, un autre con est venu me crier au visage que je devais rentrer chez moi.
Comme vous me connaissez, je ne me suis pas tue. Il hurlait, mais je hurlais encore plus que lui.
Je sais, certains diront que ce n'est pas une manière "civilisée" de parler. Je sais. Mais c'est de la théorie. Dans le feu de l'action, la politesse ou le calme...
Quelques hommes se sont joints à lui. Mais je pense qu'ils étaient plus étonnés de voir une femme répondre, mot à mot à un MALE, et aussi fort que lui, qu'autre chose.
Mon amie aussi a eu droit à quelques "compliments "machistes à la con, édulcorés à la sauce religieuse.
La manif ne pouvait plus avancer. De toute façon, nous nous étions approchés de la barrière des flics qui bloquent le passage vers le ministère de l’intérieur. Nous sommes restés encore un petit moment sur place, ensuite, la plupart d'entre nous sont partis.
Je ne sais pas ce qu'il s'était passé par la suite. Il parait, d'après ce que j'ai lu sur facebook, qu'il y avait eu des affrontements avec une jeune fille qui a du fuir et se cacher dans le magasin Zara parce qu'elle était poursuivie.
Je ne sais pas. Je n'ai rien vu de tout cela.
Pendant toute notre marche, j'ai vu des policiers. Ils regardaient sans bouger. Cela m'avait vraiment énervée. Je trouve qu'ils auraient pu essayer de protéger les manifestants. Mais non, ils étaient justes des spectateurs.
Que penser de tout cela?
Qui?
Quoi?
Comment?
Je pense que nul d'entre nous ne peux avoir de certitudes. Aucun d'entre nous ne peux affirmer ceci ou cela.
Je vais donner mon opinion. Je dis bien MON opinion. Elle est peut-être juste, peut-être pas. Mais personne d'entre vous ne peut dire qu'elle est forcément fausse.
Avant le début de la marche, j'avais pensé à une éventuelle attaque des islamistes. Ensuite, je m'étais dit qu'ils ne risquaient pas d'intervenir. Cela ne peut que leur porter préjudice.
Ils sont entrain de faire en sorte de convaincre qu'ils sont devenus démocrates, tolérants, compréhensifs... Bref, tout le blablabla pour essayer de se faire aimer, ou du moins, accepter.
Je ne pense donc pas que le parti d'Ennahdha soit derrière cette attaque.
Je pense que le barbu, qui a été le premier à nous insulter et à nous attquer, est un islamiste. Mais je pense qu'il a agit de sa propre initiative.
Un obscur énergumène qui se prend pour un chef. Un chef de gang en réalité. Il est venu avec ses sbires pour faire son intéressant et essayer de nous imposer son idéologie extrémiste et sexiste.
Sa photo a été publiée sur facebook, et il parait qu'il s'agit d'un islamiste connu. Une personne m'a même dit son nom, mais dans le doute, je préfère m'abstenir de le répéter.
Voici sa photo publiée sur facebook. Je l'ai copiée ici, parce que mes photos sont trop petites pour être claires (mon appareil photo est tout neuf, et je ne sais pas encore comme le régler). Cette photo a été prise lors de la manif.
Quant aux autres, ceux qui sont venu nous attaquer de front, je ne sais pas. D'après l'apparence vestimentaire, on ne peut pas juger. Même la barbe ne signifie pas forcément quelque chose. Mais leurs propos étaient durs et ils étaient très très agressifs et menaçants. Donc, un doute est possible.
Je pense par contre que ceux qui nous avaient ensuite agressés verbalement, et surtout celui avec lequel je me suis disputée, n'étaient que des machos primaires. Ils ont trouvé l'occasion de se montrer supérieur à des femmes et ont saisis cette occasion pour se mettre en valeur. Ou peut-être étaient -ils choqués par le fait que des femmes puissent manifester, réclamer, crier....
Ces gens sont aussi dangereux que les autres. Ils sont aussi très facilement récupérables par les courants islamistes.
Pendant toute la manif, j'ai eu peur. Sincèrement, j'ai eu peur. Un coup est si vite parti.
D'ailleurs après la dispute, j'ai demandé à mon ami (un grand type baraqué) de m'accompagner jusqu'à ma voiture pour le cas où un imbécile aurait eu l'idée de me suivre.
Je me rapelle les années 1980. J'étais adolescente, mais nous avions vécu la terreur.
Je me rappelle toutes les femmes agressées parce qu'elle n'étaient pas "décemment habillées" selon eux. Je me rappelle les actes terroristes. Je me rappelle notre frayeur.
Et je ne veux pas que nous revivions cette situation.
On nous dit à longeur de journée que la démocratie oblige à accepter tous, tous les avis, tous les partis... Qu'il faut juste trouver un moyen de cohabiter pacifiquement. Que les islamistes ont le droit d'exister, de s'exprmer, de s'habiller comme ils l'entendent...
OK. Je suis d'accord.
Mais nous?
Nous qui ne voulons pas vivre de cette façon, voudront-ils nous respecter? Voudront-ils nous laisser vivre en paix selon le mode de vie que nous choisirons? Accepteront-ils vraiment et réellement de jouer le jeu de la démocratie?
Sincèrement, je ne le pense pas. Je le souhaite, mais je ne le pense pas.
L'histoire des islamistes a toujours montré qu'ils n'étaient pas tolérants. Ils veulent toujours imposer. Ils pensent détenir la Vérité, directement de Dieu. Donc, à appliquer sans discussions.
D'après ce que j'ai vu sur Internet, les islamsites tunisiens sont descendus à la rue pour manifester depuis le 14 janvier, au moins à 4 reprises.
La première et la dernière fois, pour réclamer le Califat. La deuxième fois pour le Niquab, et la troisième pour réclamer le rétablissement de la polygamie.
Je n'ai pas entendu dire, ni vu sur les vidéos, qu'ils avaient été agressés. Ils ont manifesté sans que nous, les partisans de la laïcité et de l'égalité des sexes, n'allions les embêter. Alors pourquoi n'aurions-nous pas le droit nous aussi de manifester sans être attaqués?
Hier, j'avais appelé un ami médecin, Sami Ben Sassi, qui va tous les jours à la Casbah pour aider les manifestants. Je lui avais demandé s'il avait besoin d'aide. Il m'avait alors dicté une liste de médicaments à acheter et à lui ramener et m'a demandé de le rejoindre.
Je ne sais pas que raconter, ni quoi, ni comment. Je suis encore sous le coup de l'émotion.
Je pense que je vais particulièrement insister sur les bénévoles.
Lorsque j'avais été à la pharmacie avec ma liste, la pharmacienne était absente. La laborantine était gênée. Elle ne voulait pas que je paye, mais elle n'osait pas prendre l’initiative de me donner des médicaments gratuitement. Il a fallut la convaincre que je ne pouvais pas attendre, que j'avais besoin de ces médicaments et que j'allais les payer. Elle a insisté, ensuite, nous sommes arrivées à un compromis: je payais ce que je prenais, mais je lui laissais mon numéro de téléphone pour que la pharmacienne me contacte et me donne gratuitement d'autres médicaments si elle le désire.
Un laborantin qui avait assisté à la discussion est allé chercher une vingtaine de boites d'Efferalgan à la vitame C et me les a offert. Il a dit à sa collègue de les mettre sur sa note. Du coup, une autre laborantine est allée me chercher divers autres médicaments et me les a aussi offert, en les prenant en charge elle-même.
J'étais touchée par leur générosité. Vraiment.
A la Casbah, j'ai constaté que l'armée encercle les manifestants et que normalement, on ne peut les rejoindre. Mon ami est médecin, et je portais des sacs de médicaments. Ils nous avaient donc laissés passer sans problème..
J'ai été étonnée de constater à quel point notre docteur était populaire parmi les manifestants. Certains le saluaient, d'autres le remerciaient, d'autres encore le consultaient...
A la Casbah, j'ai été étonnée par l'organisation des manifestants. Ils sont regroupés par ville. Chaque ville a sa tente ou son campement. Les manifestants étaient pacifiques. Certains vaquaient à leurs occupations (préparer le couchage pour le soir à cause de la pluie qui avait mouillé des matelas et des couvertures, nettoyage, distribution de nourriture, de vêtements...).
Je n'ai pas vu de groupes d'islamistes. En fait, pendant les 4/5 heures que j'ai passées à la Casbah, je n'ai vu que deux barbus habillés de 9amis. Et je n'ai vu qu'une seule pancarte islamiste.
Arrivés à la petite cellule médicale, nous y avons trouvé environ 4/5 médecins et une infirmière. Ils avaient organisé un système de garde de façon à ce qu'il y ait en permanence des médecins pour parer à toute éventualité.
Nous étions 3 ou 4 personnes non qualifiées. Nous nous sommes attelées à la tâche: rangement, aide, classement des médicaments...
Au début, il y avait juste quelques personnes qui venaient pour des petits bobos (petites blessures, maux de gorge, mal de dents...), quelques uns pour des problèmes plus graves (diabète, asthme...) et puis, arrivée du premier gréviste de la faim.
Et ensuite le 2ème, et le 3ème, le 4ème, le 5ème...
Cela a été un peu la folie. On aurait dit un service d'urgence. Ces gens étaient dans un était de pré-coma ou de coma hypoglycémique. Il fallait les soigner, les perfuser...
Entre temps, d'autres médecins étaient arrivés.
Mais la nuit était tombée. Et il n'y avait pas de lumière. Les médecins travaillaient grâce aux torches des téléphones portables et des bougies. Ce n'était vraiment pas facile. Essayez donc de trouver une veine et la piquer sans lumière!
Des journalistes étrangers étaient sur place. Mais ce qui est étonnant, je n'en ai pas vu un seul tunisien, du moins, pas dans la cellule médicale.
Les médecins s'activaient comme ils le pouvaient. Certains ont pu faire jouer leurs connaissances pour obtenir une ambulance et faire ainsi évacuer les malades à l'hopital Aziza Othmana.
Le docteur Sami Ben Sassi a appelé Sami Zaoui, secrétaire d’Etat aux Technologies de la communication au sein du nouveau gouvernement d’union nationale, pour lui demander d'intervenir d'urgence auprès du gouvernement pour avoir de la lumière et pour avoir des équipes médicales et au moins une ambulance.
Quelques minutes plus tard, il y avait de la lumière, et une promesse d'aide médicale.
Sami Ben Sassi a aussi appelé les médias tunisiens pour obtenir une couverture médiatique et pour lancer un appel aux bénévoles pour qu'ils viennent aider les manifestants en tant qu'êtres humains, quelques soient leurs idéologies politiques.
Ce qui m'a vraiement plaisir hier, c'était de voir des gens calmes, pacifiques, bien élevés. Très loin de la pagaille qu'on aurait pu imaginer.
Ce que j'ai adoré surtout a été de voir que nombreux étaient ceux qui voulaient aider. On m'a parlé d'une cellule des avocats qui étaient là pour aider. On m'a parlé d'entreprises et de particuliers qui avaient proposé leur aide (sous couvert d'anonymat, donc pas pour la pub), on m'a parlé de gens qui étaient venu donner de l'argent, des médicaments, de la nourriture, ou même une oreille attentive... On m'a parlé de solidarité, d'aide, de réconfort.
Et cela m'a vraiment fait plaisir.
Je suis fière de vous Tunisiens. Vraiment fière. Fière d'être Tunisienne.
Le soir, en partant, nous étions 3 femmes. On nous a confié à un bénévole pour qu'il nous accompagne jusqu'à nos voitures. Heureusement, il a été notre ange gardien, et sans lui, nous aurions pu tomber dans un guet-apens. Je vous en parlerais dans ma note suivante, ne voulant pas gâcher celle-la à cause de personnes malhonnêtes et opportunistes.
Vous trouverez les photos que j'avais prises hier ici. Malheureusement, j'étais plutôt occupée et je n'ai pas pu en prendre plus.
Les commentaires récents