"Ils passèrent auprès du cours de géographie improvisé, or à ce moment précis le maître disait: "Là où subsiste encore un peu de brouillard, se sont forgés les grands et les petits mythes...". Le Dr Stern afficha le sourire d'un homme riche, qui en outre, vient de gagner à la loterie. "Voyez-vous, cher ami, dit-il en passant le dos de la main sur sa moustache, ce vaillant pédagogue a résumé toute mon argumentation en quelques mots. Nous les hommes nous inventons des mythes, grands et petits, affirmons qu'ils sont solides comme le roc des montagnes, et dissipons nos propres doutes par un brouillard de traditions et de rites.
- Il est facile de ne croire en rien." Pin'has sentait monter en lui une colère jusqu'àlors inconnue.
"Au contraire, cher ami." Cette phrase-là aussi, le Dr Stern l'avait attendue, comme un danseur exercé, à la fin d'une figure compliquée, saisit sans regarder la main de sa partenaire. "Ne croire en rien est difficile! Il est aisé d'avaler sans résistance la bouillie cent fois prémâchée de ce que pensaient les générations précédentes. Il est facile de plier docilement le genou, faire le signe de croix ou mettre les tefilline, de sauter à minuit par-dessus un tas de bois en flammes, de pratiquer l'un ou l'autre des rites étrangers forgés par nos ancêtres au nom de divinités qu'ils ont eux-mêmes inventées. Il est facile de considérer n'importe quel texte sacré comme la parole divine, d'accepter sans critique les prémisses d'une religion et de n'utiliser son intelligence que pour en tirer, sans fin, de nouvelles déductions. Nous les juifs, nous sommes passés maitres en la matière, en l'art de trouver pâture jusque dans les moindres ramifications de prétendus préceptes divins, tels des vers xylophages dans un arbre mort depuis longtemps. Des nuits entières, nous étudions des commentaires médiévaux, rien que pour comprendre des discussions menées il y a quinze cent ans, nous palabrons à en perdre haleine sur les rituels des services sacrificiels dans un temple détruit il y a deux mille ans. Nous gaspillons notre intelligence parce que nous ne trouvons pas le courage de mettre en question des contes archaïques. Oui, des contes, parfaitement! Mais voilà: qui ne veut pas penser en est réduit à croire." Cette dernière phrase lui plut au point qu'il exécuta illico une petite danse...
"Savez-vous ce qui me frappe? demande Pin'has en sentant monter en lui le plaisir anticipé éveillé par la certitude de lancer dans la bataille un argument massue. Savez-vous ce qui me frappe, et même beaucoup? Vous dites toujours "nous". "nous les juifs". Avec toutes vos contestations, vous vous considérez toujours comme l'un d'eux.
-Disons: je ne m'exclus pas. Tant que cette notion désigne un peuple et non une communauté de foi. Mais autrement... A ce propos, je peux vous raconter une histoire drôle.
(...)
"Cela remonte à déjà...", commença le Dr Stern, prenant la mine pensive qu'affichent les gens bavards pour tenter de donner à un récit cent fois répété une couleur d'authentique spontanéité. "Plus de dix ans, en effet. Comme le temps passe! A cette époque, il était devenu clair, pour moi, que ma conscience m'interdisait désormais, par égard pour mes brebis...". Il s'interrompit, et cette interruption aussi semblait tracée sur son manuscrit. "Brebis, un beau mot n'est-ce pas... Il décrit avec tant de justesse la soumission aveugle avec laquelle des gens par ailleurs forts intelligents suivent pieusement les troupeaux de leur religion, flanqués en permanence par les chiens glapissants des feux de l'enfer et de la damnation éternelle. Ainsi que je l'ai dit, j'avais compris que je me trahirais moi-même si je continuais à expliquer à ma communauté des préceptes auxquels je ne croyais plus - bien que ces exégèses par elles-mêmes fussent parfaitement correctes. Absurdes, comme tout ce bla-bla religieux, mais correctes. Si l'on y réfléchit: un Dieu qui se soucie de savoir si le pitoum d'un essrog - l'extrémité supérieure d'un cédrat - est cassé, pareil pinailleur céleste, à l'affut de la moindre vétille, ne peut être qu'une invention humaine! Seuls les hommes sont assez bêtes pour nous fabriquer une image du monde qui est un collage de détails sans importance.
Charles Lewinsky - Extrait du roman Melnitz.
Tout dépend de quoi on parle!
Je crois a la nature....
Je crois a la beauté, à la faim ,à la soif. JE Crois AU BIEN ET AU MAL QUE JE PEUX FAIRE OU DIRE. Je crois au progrès aux sciences...
Mais aucune croyance sectaire ( religions)n'encombre mon esprit....
Rédigé par : DESEILLE CHARLES | 26/12/2010 à 18:50